Les enfants ont au moins une qualité que personne ne pourra jamais leur enlever, qui fait tout leur charme et toute leur fraîcheur : les enfants ont de l'imagination. Ils s'inventent des mondes exotiques avec trois boites de carton et deux coussins, créent des planchers de lave brûlante ou des repères secrets sans l'aide des adultes. En fait, c'est souvent quand les adultes s'en mêlent que tout est gâché. Un peu comme c'est le cas avec L'espion d'à côté, un film sans imagination, et qui souffre beaucoup de la présence des adultes sur son terrain de jeu.
Bob Ho est un espion talentueux qui est sur le point de prendre sa retraite. En relation depuis trois mois avec sa voisine Gillian, il peine à se faire aimer de ses trois enfants Farren, Ian et Nora. Un soir, il capture un criminel recherché sur le point de commettre un grave délit, et il part à la retraite. Lorsque Gillian doit quitter la ville quelques jours, il accepte de veiller sur les enfants. Mais c'était sans compter sur les nombreux imprévus et sur ce méchant terroriste qui veut à tout prix retrouver les codes secrets qu'on lui a dérobés.
Après tant de films en sol américain, on est un peu à court d'idées pour faire faire à Jackie Chan les acrobaties qui l'ont rendu célèbre. Cette nouvelle idée, qui voudrait bien faire d'une pierre deux coups (film d'action et film pour enfants), s'avère tout spécialement tirée par les cheveux alors que la plupart des situations sont faites dans le cabotinage le plus élémentaire. Les personnages se trahissent pour une blague - comme pour les troubles vestimentaires du méchant, ou les problèmes stéréotypés des jeunes à l'école (indépendance, intimidation) - et l'histoire part dans tous les sens. À tel point que les enfants ne s'y identifieront pas. Aucun thème n'est abordé, sinon les gadgets de l'espion (certains auraient sans doute préféré les gadgets de maman). Quand Chan fait son artifice, ça va, mais les raisons qu'on a trouvées pour le placer-là frisent l'improvisation.
Les situations, toutes affreusement clichées, ne servent même pas bien le récit puisqu'elles l'allongent inutilement. Car si le film n'était qu'une comédie, ou alors qu'un film d'action, peut-être apprécierait-on les quelques situations loufoques dans lesquelles on jette Chan, à la manière du rafraîchissant (en tout cas en comparaison) Heure limite.
Les jeunes comédiens sont souvent assez amusants et ils se débrouillent bien, ce qui ne permet pas tout à fait d'effacer le jeu maniéré d'Amber Valletta et de l'infecte Billy Ray Cyrus. Une honte, vraiment, tout comme la panoplie de personnages secondaires qui ne semblent même pas convaincus que les enfants seront séduits.
On dirait qu'une bonne idée d'adulte concernant les enfants est obligatoirement condescendante. La simplicité prime avant tout, et si cela prévient que les enfants posent trop de questions embarrassantes pour leurs parents (pourquoi Bob ne dort-il pas avec Gillian? Ils ne sont pas mariés!), cela assure aussi qu'ils oublieront aussitôt les quelques émotions répétitives qu'ils auront vécues lors du visionnement. L'espion d'à côté est tout simplement un film ennuyant. Pour les enfants autant que les adultes. Même si certains enfants pourront croire qu'ils ont apprécié, on aura tôt fait de réaliser qu'ils n'auront rien retenu. Tant mieux.