On ne compte plus les excellents films sur des rapts d'enfants. Depuis que Alfred Hitchcock (The Man Who Knew Too Much) et Akira Kurosawa (Entre le ciel et l'enfer) ont pavé le chemin, de nombreux longs métrages intéressants sur le sujet ont vu le jour. Un des derniers en liste était même mis en scène par Denis Villeneuve (Prisoners). Évidemment, tout finit par s'équivaloir et il y en a des mauvais aussi. Un des pires serait même Kidnap.
Cette production qui devait prendre l'affiche en 2015 a longtemps croupi sur les étagères et ce n'est guère surprenant. L'ensemble est si stupide, si invraisemblable qu'il est impossible de tolérer tant de bêtises. Sauf que contrairement à plusieurs séries B jouissives, il s'avère extrêmement difficile d'en rire tant l'effort, lui, se prend terriblement au sérieux.
Tout débute par une succession de photographies polaroid qui montrent un bébé grandir sous nos yeux. Le tout est accompagné d'une mélodie sirupeuse. Une introduction ringarde et appuyée qui tente déjà de manipuler le spectateur en lui faisant croire qu'un lien unique existe entre une mère (Halle Berry) et son fils. Bien entendu, comme le titre l'indique, l'enfant se fera enlever et maman en colère se mettra à la poursuite des ravisseurs.
C'est là qu'apparaissent les poursuites sans queue ni tête et les confrontations psychologiques primaires. L'héroïne roule dans sa grosse voiture au sein d'un montage images/musique qui singe allègrement Speed. Les réactions de la protagoniste dépassent l'entendement et ceux des méchants atteignent un sommet de médiocrité. Il n'y a aucune réflexion sur ce sujet criant d'actualité, autrement qu'il ne faut pas compter sur la police en cas de besoin. Pondre un scénario aussi risible et sensationnaliste est carrément un exploit et dans le domaine, Knate Gwaltney a beaucoup de talent.
Personne ne viendra à la rescousse de ce script en roue libre. Le réalisateur Luis Prieto (qui n'a convaincu pratiquement personne avec son remake assommant de Pusher) ne s'essaye même pas, trop accaparé à faire succéder une suite d'images platement filmées et éclairées. Le comble lorsqu'on tourne en Nouvelle-Orléans, un des plus beaux endroits des États-Unis, qui a entre autres été un personnage à part entière dans l'excellente série True Detective où il était également question de disparitions troublantes.
Halle Berry est la seule à multiplier les efforts. Elle pleure, crie, hurle et supplie Dieu en vain. Encore une fois, multiplier les gros plans n'était pas la meilleure idée, ni la laisser complètement à elle-même. L'actrice qui est en perdition depuis qu'elle a remporté un Oscar pleinement mérité pour Monster's Ball il y a 15 ans n'avait-elle pas déjà appris des erreurs du ronflant The Call en 2013 où elle incarnait une téléopératrice d'un centre d'appel qui venait en aide à une jeune fille kidnappée? Il semble bien que non. La seule bonne nouvelle dans son cas est qu'il s'agit ici d'un «vieux» long métrage et que la comédienne a depuis changé d'agent (on la verra bientôt dans Kingsman: The Golden Circle et Kings de la cinéaste derrière le fabuleux Mustang).
Alors qu'on pensait naïvement qu'à notre époque, des films aussi indigestes sortaient directement en DVD ou sur Internet, Kidnap nous rappelle le contraire. En voilà un qui risque d'être impossible de déloger à la prochaine cérémonie des Razzie. À côté, les Taken s'apparentent presque à du Orson Welles.