Rédiger une critique
Vous devez être connecté pour pouvoir rédiger une critique.
Julinégale.
S’il y a bien une chose que l’on ne reprochera pas à ce « Julie (en 12 chapitres) » c’est bien sa modernité. Une modernité de ton, une modernité de sujet, une modernité de mise en scène et une modernité de traitement. Un film parfaitement dans l’air du temps en somme et une œuvre qui nous parle de la vie avec un grand V. En effet, toute personne (homme ou femme) se retrouvera un petit peu dans les pérégrinations, les choix et les envies de l’héroïne, celle-ci étant l’exemple parfait d’une jeune femme de notre époque. Et dans l’ensemble, c’est ce côté très contemporain qui est l’atout majeur du long-métrage. Cependant, il se heurte à un problème inhérent à sa construction et à son montage, en l’occurrence le fait de découper le film en chapitres comme son titre l’indique. Un peu comme dans la plupart des films à sketches où la qualité de chaque segment est variable, celle des chapitres du film est loin d’être équivalente. Et si certains d’entre eux nous emportent sans problème, d’autres se révèlent plus mitigés voire clairement ennuyants.
Et on peut noter que la qualité des différents segments baisse au fur et à mesure que le film avance. Comme celui-ci fait plus de deux heures, le dernier tiers nous apparaît quelque peu longuet et plus fastidieux, la légèreté payante des débuts faisant place à une mélancolie voire un aspect tragique moins emballant. En effet, sur ces versants, Joachim Trier se révèle moins pertinent, partant vers plus de psychologie (lourde) et de drame (peu émouvant). Il en résulte de ce « Julie (en 12 chapitres) » un constat nuancé et en dents de scie. En revanche, sur un palmarès cannois quelque peu discutable et étrange l’an passé, on ne peut que louer et acclamer le Prix d’interprétation féminine reçu par Renate Reinsve. C’est pleinement mérité pour ce qui s’apparente clairement à la révélation d’une comédienne. Elle illumine le film à chacune de ses bobines grâce à son naturel désarmant affiché dans chacune des situations où elle apparaît. Au point même de faire de l’ombre à ses partenaires. Le film porte le nom de son personnage et c’est une évidence comme on en voit peu!
Très inspiré par la Nouvelle Vague, Trier nous gratifie d’une mise en scène parfaitement limpide qui semble réinventer ce courant. A la fois frivole et appliquée, sobre et sophistiquée, posée et aérienne, sa réalisation impressionne comme lors de cette séquence inoubliable où Julie vit la rencontre avec son amant alors que tout autour d’elle est arrêté. Un coup de foudre n’aura que très rarement mieux été mis en images. Mémorable. Mais il se loupe aussi parfois, comme lors de la séquence avec les champignons hallucinogènes. Les traits d’humour sont rares ou légers mais ils fonctionnent et le cinéaste n’a pas son pareil pour croquer les banalités de la vie à l’image en leur donnant un potentiel cinématographique certain. A la fois comédie, drame, chronique et film d’amour, son œuvre est riche et épingle nos sociétés et leurs vices avec beaucoup d’acuité et de pertinence. « Julie (en 12 chapitres) » aurait pu être le film d’une génération si Trier avait un peu coupé dans le gras (notamment dans la dernière partie) et s’était empêché ce découpage inutile qui sape la fluidité de l’ensemble. Un beau film imparfait qui pourrait marquer son époque s’il avait été plus simple et moins avide de la reconnaissance critique.
Plus de critiques cinéma sur ma page Facebook Ciné Ma Passion.