Rédiger une critique
Vous devez être connecté pour pouvoir rédiger une critique.
Black Power Forever.
Pour un premier film, c’est un coup de maître et un bel uppercut! Shaka King embrasse un sujet abrasif et qui raisonne encore fortement aujourd’hui par le biais du mouvement Black Lives Matter. Quasiment aucun film récent n’est revenu sur ce mouvement mythique créé par des afro-américains pour défendre leur cause de manière politique et non pacifique, voire violente. Et avec l’actualité récente, ce « Judas and the Black Messiah », tiré en outre de faits réels, tombe à pic. Notamment parce que les Panthers s’en prenaient beaucoup aux flics, eux-mêmes responsables de nombreuses bavures racistes. Beaucoup d’œuvres citent le mouvement, en parlent ou l’évoquent, voire même le développent lors d’une sous-intrigue mais aucune d’entre elles, de mémoire récente, traite ce sujet polémique frontalement. Pourtant, c’est une pierre fondatrice dans l’Histoire américaine et plus précisément dans la lutte pour l’égalité raciale et les droits civiques. Et on peut dire que King (on parle de Shaka ici pas de Martin Luther...) rend hommage au mouvement sans pour autant en faire l’apologie. Le propos est assez nuancé ici et au vu des éléments traités, c’est une gageure et une qualité.
Pour illustrer son propos quoi de mieux que le classique film d’infiltration. Cela permet de mettre le spectateur dans la peau d’un nouvel arrivant qui découvre l’organisation même si toutes les séquences ne sont pas filmées de son point de vue, cela facilite l’immersion. Un peu à la manière d’un « Training Day » (qui traitait des flics ripoux) ou d’un « Ennemis rapprochés » (le film parlait de l’IRA, autre organisation terroriste du même acabit). Ce procédé est classique mais toujours efficace et ici il est véridique puisque les interviews de l’infiltré ponctuent le récit de manière assez adroite, jusqu’au dénouement et aux encarts finals qui font froid dans le dos. C’est tendu, prenant et on a souvent peur pour lui, même si ce n’est pas un saint et plutôt un traitre. En effet, notre cœur (et le film) nous fait avoir de l’empathie pour le mouvement et ses révolutionnaires (sans pour autant l’excuser, encore une fois) donc on est quelque peu pris entre deux feux.
Dans les rôles principaux, Daniel Kaluuya en chef du parti, Fred Stanton, est bon mais il n’a peut-être pas la carrure pour un tel rôle. Ce n’est pas lui à qui on aurait pensé en premier. On remarquera davantage Lakeith Stanfield, intense et très investi dans le rôle de la taupe. Et on se demande si une inversion dans la distribution des rôles n’aurait pas été bénéfique à « Judas and the Black Messiah ». Enfin, Jesse Plemons prend les traits de l’agent du FBI qui fait du chantage avec brio et couvre le contexte très intéressant du film : celui qui voit le patron du FBI, J. Edgar Hoover, tout faire pour éliminer Stanton ainsi que toutes les magouilles et la corruption au-dessus des lois de l’époque mises en place pour le faire tomber. Intéressant, passionnant même, cette œuvre méconnue est malheureusement sortie en pleine crise mais elle devrait faire date pour le public afro-américain. On ne voit pas le temps passer et les scènes instructives se disputent à celles sous haute tension ou pleines d’émotion comme le final qui met KO.
Plus de critiques cinéma sur ma page Facebook Ciné Ma Passion.