En croisant l'esprit du western au film noir policier, Jean-Pierre Melville a créé plusieurs classiques, dont Le samouraï avec Alain Delon qui demeure un des longs métrages les plus « cool » du septième art. Cette figure du héros solitaire qui répond à un code d'honneur a inspiré de grands cinéastes, que ce soit Michael Mann, John Woo, Quentin Tarantino et Nicolas Winding Refn. John Wick a décidé de lui rendre hommage en 2014 et cela a donné une production extrêmement divertissante, qui vient d'être gratifiée d'une suite.
Les fans de la première heure seront comblés et en terrain connu : ce second chapitre reprend tous les éléments de l'original - la grande violence qui coule à flots, le style exubérant, l'absurdité des situations - pour les décupler encore et encore. Un processus évidemment vain et soûlant si on s'attend à une histoire complexe, des héros torturés et un peu trop de sérieux. Mais beaucoup de plaisir si on ne cherche qu'à prendre son pied sans trop se poser de questions devant un long et amusant vidéoclip de deux heures.
Cette série B jouissive à ses heures débute sur des chapeaux de roues avec notre mythique John Wick qui donne une volée aux malfrats qui ont eu la mauvaise idée de lui dérober sa voiture. Une introduction assez décoiffante qui est déjà largement supérieure à l'ensemble de Jack Reacher: Never Go Back. En voilà un héros qui ne prêche que pour son individualité (ne touche pas à mon chien ou à ma retraite) et qui tuera plus d'une centaine de méchants. À poings nus ou avec une arme, Keanu Reeves est intraitable et il excuse presque une flopée de navets en retrouvant son personnage le plus emblématique depuis The Matrix. Surtout qu'il se donne la peine d'effectuer ses cascades.
L'acteur sait qu'il ne doit pas trop parler pour être convaincant. Il laisse ça aux autres : au diabolique Riccardo Scamarcio et à son ancien ami Common. Mais aussi au mystérieux Ian McShane, au serviable Lance Reddick, à l'intraitable Laurence Fishburne et au toujours sympathique John Leguizamo. Évidemment, trop de blabla vient noyer une intrigue déjà sommaire. C'est là qu'apparaît Ruby Rose, une assassine muette qui prouve enfin que la comédienne peut être crédible. Ce qui n'était pas le cas de ses participations aux récents xXx: Return of Xander Cage et Resident Evil: The Final Chapter.
Tout cela est bien beau, mais ce n'est pas toujours suffisant. C'est lorsque les confrontations, les poursuites et les combats surviennent que l'ensemble s'élève au-dessus d'une moyenne assez médiocre, surtout si on exclut Mad Max: Fury Road. L'action est spectaculaire à souhait et bénéficie de chorégraphies élaborées, qui empêchent le montage de tout saccader. Même si on reconnaît Montréal dans ce New York saturé de néons, le réalisateur Chad Stahelski est de retour derrière la caméra et il n'a pas perdu son oeil pour le plan graphiquement léché et les mélodies imparables. Et quelle belle idée d'offrir un affrontement tardif dans une chambre de miroirs saturés! Cela renvoie directement au brillant Mad Detective de Johnnie To, autre grand admirateur de Melville.
John Wick: Chapter 2 n'est pas aussi original, trépidant et époustouflant qu'il aurait pu l'être. Ce n'est dans aucun cas The Raid 2. Mais pour une fois qu'une suite est aussi réussie que son prédécesseur, les admirateurs du genre ne voudront pas s'en priver. En attendant le troisième volet qui ne risque pas de tarder...