Il ne faut pas toujours se fier aux titres des films. Ils comportent pourtant bien souvent un fond de vérité. Pour Jack Reacher: Never Go Back, c'est on ne peut plus clair. Même s'il s'agit d'une adaptation d'un nouveau livre du romancier britannique Lee Child, son nom indique tout. Il ne fallait pas y retourner. Surtout pas après un premier volet aussi fort en gueule.
Sans être mémorable, Jack Reacher qui a pris l'affiche en 2012 comportait ce supplément d'âme qui fait souvent toute la différence dans les longs métrages d'action. Il était drôle, mouvementé, violent et excitant, mettant à profit le côté iconique de sa vedette. Un divertissement complètement inattendu à rendre jaloux tous les Deadpool de ce monde qui ne comportent pas un quart de son irrévérence.
Devant un tel succès, une suite devait voir le jour. C'est maintenant fait et elle ne peut que décevoir. Ce n'est cependant pas la faute de Tom Cruise qui y apparaît en pleine forme. La star est toujours aussi charismatique et son duo avec Cobie Smulders - en remplacement de Rosamund Pike - fonctionne plutôt bien. L'actrice trouve enfin l'occasion de briller et sa performance risque d'ouvrir les yeux aux bonzes de Marvel pour lui développer un rôle plus important dans les Avengers.
C'est tout le reste qui cloche. Jack Reacher s'est réinventé en luttant en marge des codes et de l'ordre établi et c'est ce qui manque cruellement au menu. Le récit routinier au possible accumule poursuites et combats un peu n'importe comment, en lassant rapidement et sans aucun respect de ce qui a été fait précédemment. Il brise même son rythme en incluant une histoire familiale où l'émotion et l'humour ne forment pas une union cohérente. Avant, les incohérences faisaient sourire. Là les invraisemblances horripilent parce que le côté "cool" n'y est plus. On a plutôt l'impression de revoir un remake du récent Jason Bourne avec encore plus de clichés et sans la mise en scène si riche de Paul Greengrass.
En remplacement de Christopher McQuarrie qui est allé travailler sur le plus que satisfaisant Mission: Impossible - Rogue Nation, on a appelé Edward Zwick en renfort. Ce cinéaste a déjà fait d'excellents films par le passé (comme Glory) et il a toujours été à l'aise en mode militaire (avec Courage Under Fire et The Siege). Il est cependant en panne d'inspiration depuis longtemps, accumulant déception après déception (Pawn Sacrifice, Love & Other Drugs, Defiance...). Ce n'est pas en renouant avec le héros de The Last Samurai que ça va changer la donne. Sa réalisation totalement anonyme manque d'impact, semblant tout droit sortie d'une autre époque.
Les rares thèmes dignes d'importance (notre protagoniste a besoin des autres, il doit apprendre à laisser le contrôle aux femmes et même devenir un bon père) ne sont que des prétextes à une production prédigérée et interchangeable, qui détruit presque complètement la magie de son prédécesseur. Ce dernier surprenait constamment et il pouvait compter sur un casting à toute épreuve qui incluait Richard Jenkins, David Oyelowo, Robert Duvall et surtout Werner Herzog en grand méchant plus-que-parfait. Jack Reacher: Never Go Back ressemble plutôt à une épave fatiguée qui tente seulement de surfer sur cette aura qui est devenue pratiquement culte.