Déjà, le déplacement de Jack the Giant Slayer au calendrier de juin à mars était plutôt impromptu et très peu encourageant pour ce film librement inspiré d'un conte classique anglais. Les bandes-annonces n'étaient pas non plus très convaincantes et les quelques images issues du film ne nous permettaient pas d'espérer un chef-d'oeuvre visuel. C'est donc avec très peu d'attentes qu'on approche Jack. Même s'il nous arrive souvent d'être surpris avec des films qui nous laissent ainsi, d'emblée, de glace, ces minces attentes que nous avions envers Jack the Giant Slayer ne nous permettent pas de considérer la production comme surprenante. Le film est passable, peut-être, mais étonnant, pas du tout.
Jack the Giant Slayer comporte de nombreux illogismes temporels, proportionnels, narratifs et idéologiques. Un humain qui se promène parmi les géants et qui ne se fait pas repérer au contraire de ses semblables, un groupe de colosses (trois, quatre fois la taille des hommes) qui affrontent des êtres humains au souk à la corde et perdent, des haricots magiques qui poussent à des vitesses inégales et bien d'autres incongruités entravent l'expérience cinématographique et parsèment le long métrage d'aventures fantastiques de Bryan Singer. Comme dans bien des productions mal écrites et mal construites, les protagonistes parviennent souvent à atteindre leurs objectifs grâce à la chance et le hasard. C'est, nous l'aurons compris, encore le cas ici, dans ce film où un fermier parvient à contrer une armée de géants avec comme seule arme un simple petit couteau.
Les décors et les costumes ne sont pas non plus impressionnants comme ils auraient dû l'être. On ne peut faire abstraction des paillettes sur l'armure de la princesse et de tous les accessoires en plastique à peine camouflés sur les vêtements des nobles. Pour ce qui est de cette fameuse liane qui fait le lien entre la terre des hommes et celle des géants, elle ressemble drôlement aux hautes herbes de Honey, I Shrunk the Kids (un film, je le rappelle, de 1989). Il me semble que la technologie moderne nous permet de construire des univers beaucoup plus spectaculaires qu'il y a vingt ans, et, malheureusement, les nombreuses années de progrès dans le domaine des effets spéciaux semblent futiles lorsqu'on regarde Jack the Giant Slayer. Même les géants - qui aurait dû être la principale préoccupation « visuelle » - n'ont pas la prestance qu'ils auraient dû avoir ni l'aspect effrayant qu'on envisageait.
Sa nouvelle date (maintenant au début de la semaine de relâche) et son nouveau titre (le film était précédemment titré Jack the Giant Killer) sont de bons indices de l'intérêt familial de la production. Le réalisateur a pris bien soin de ne montrer aucune goutte de sang. On arrache des têtes en arrière-plan, on tranche des gorges hors champ et on suggère mort d'hommes, mais tout est calculé pour ne pas montrer directement le geste... Évidemment, l'idée est discutable puisque des géants qui mangent des humains restent tout de même un bon prétexte aux cauchemars.
Avant la conclusion, le film n'est pas complètement un échec, mais dès qu'on nous présente les dernières images - qui nous promettent un deuxième opus et un prolongement de nos souffrances -, nous ne pouvons que nous rendre à l'évidence; Jack the Giant Slayer est aussi mauvais qu'on l'envisageait.