La volonté de Samuel Thivierge était noble et inspirante. Le jeune homme s'est efforcé de réaliser son film, malgré le refus des institutions et les embûches que la vie et le milieu ont mises sur sa route. Par contre, même la ténacité la plus intègre et le dévouement le plus complet ne peuvent assurer la réussite d'un projet. Son film de très grande envergure n'a peut-être pas manqué d'amour, mais il a souffert d'un manque évident d'effectifs et de ressources.
Thivierge, jeune cinéaste qui nous a donné La fille du Martin en 2014, a déployé des efforts titanesques, tant devant la caméra que derrière, pour faire de son film un succès. D'un point de vue esthétique, le choix du grand-angle en est un bien particulier. On s'imagine que le réalisateur a voulu donner à son film un effet de grandeur et d'abondance, mais les défauts techniques qu'apporte ce type de lentille, notamment les extrémités de l'image qui se déforment, nuisent à l'appréciation de l'oeuvre.
Du point de vue de l'interprétation, Samuel Thivierge se débrouille relativement bien dans le rôle du petit voyou, mais sa montée fulgurante dans le monde de la criminalité s'avère moins crédible. Leonardo DiCaprio n'a pas eu de mal à nous convaincre qu'un gamin insolent puisse arnaquer les plus grandes entreprises de l'Amérique dans Catch Me If You Can, mais Samuel Thivierge a un peu plus de mal à nous le faire croire, même à l'échelle du Québec.
Samy Naceri, qui a remplacé Thierry Lhermitte au pied levé quand ce dernier a dû annuler son voyage au Canada en raison d'une blessure, est plus crédible sous les traits du mentor arrogant du jeune protagoniste. Fidèle à lui-même, Gilbert Sicotte livre une performance d'une vibrante sincérité. On s'attache rapidement à cet homme qui s'apprête à vendre sa plus précieuse possession matérielle à un vicieux fraudeur d'à peine 20 ans.
L'histoire, inspirée de faits vécus, est intrigante et nous tient en haleine pendant un bon moment. C'est davantage vers la fin que les choses se gâtent alors que le nombre de péripéties s'additionne à un rythme effarant jusqu'à une conclusion décevante et prévisible.
Identités exploite un sujet captivant et d'actualité, soit celui de la fraude et de l'arnaque. Il est certainement intéressant de découvrir les techniques des voleurs et leur morale élastique. Le film de Samuel Thivierge aurait certainement tiré profit d'un budget plus important et de quelques ajustements au point de vue narratif, mais il n'est pas le fiasco qu'il aurait pu être entre d'autres mains.