C'est la deuxième année consécutive que le travail de Guillermo del Toro est traîné dans la boue. Après l'insignifiante suite à Pacific Rim, place à l'affligeant redémarrage de Hellboy.
On n'avait plus eu de nouvelles de ce puissant monstre rouge depuis le fort satisfaisant The Golden Army. C'était en 2008, la même année où Iron Man allait modifier à jamais le paysage cinématographique de superhéros. Une décennie plus tard, le voilà renaître de ses cendres... et il a bien changé.
Maintenant incarné par David Harbour qui possède indéniablement le physique de l'emploi, ce reboot ne revient pas tant sur les origines du personnage principal - cela a déjà été fait dans le Hellboy original - qu'il propose une nouvelle aventure où il sera question, évidemment, d'éviter la destruction de la planète. Même en s'inspirant de différents épisodes de la populaire bande dessinée, l'intrigue demeure la même.
Cette fois, les éléments fantaisistes et poétiques sont demeurés au vestiaire. Le scénario d'Andrew Cosby a plutôt opté pour mettre de l'avant la violence, la brutalité, la noirceur et même l'horreur. Une idée plus « adulte » qui se défend et qui tranche avec le travail trop souvent propret de Marvel et DC Comics.
Le résultat est malheureusement catastrophique. Les incessantes scènes d'action sont dignes de jeux vidéo de l'époque de la première Playstation, alors que les effets spéciaux s'avèrent risibles. Mais rien pour amuser comme le faisait si bien Deadpool. Les tentatives d'humour sont tellement nombreuses et inopérantes qu'elles finissent par peser sur la patience du spectateur.
Cette sensation d'être constamment asservi par tant de stimulus se reflète également dans le script, aussi brouillon que celui de Suicide Squad. Il y a plein d'entités amies ou ennemies qui apparaissent n'importe où dans l'histoire, sans faire de sens. Une indigeste relation père/fils est le prétexte à la morale et aux bons sentiments, alors que de ridicules ellipses temporelles détruisent le peu de cohérence qu'il restait.
Difficile de faire plus bordélique. Et quelle (mauvaise) surprise d'apprendre que c'est Neil Marshall qui est aux commandes! Celui-là même qui a offert en The Descent un des suspenses les plus effrayants du siècle. En fait, son Hellboy faillit là où son très divertissant Doomsday prenait vie. L'amalgame de genres, de styles et de tons est un mélange délicat, qui finit par vous exploser au visage lors d'un mauvais dosage.
C'est à se demander si le cinéaste anglais n'a pas fait exprès de saboter son propre film. Au sein d'un des nombreux thèmes mal exploités, notre héros hésite entre écouter sa bête intérieure ou continuer à suivre les règles humaines. Marshall et Cosboy ont opté pour libérer le démon de sa boîte de Pandore, faisant volontairement ressortir ce qu'il y a de plus cacophonique et vulgaire de ces superproductions trop souvent interchangeables qui prennent l'affiche pratiquement à chaque semaine. Une métaphore du rouleau compresseur que l'on pourrait très bien retrouver dans l'un des cercles de l'Enfer de la Divine Comédie de Dante.
Cela ne rend pas ce Hellboy plus supportable. Bien que pratiquement sans fin, ce cauchemar sera rapidement oublié dès la sortie d'Avengers: Endgame. Mais Guillermo del Toro devrait apprendre à protéger son héritage. Sinon on se retrouvera avec des suites du Labyrinthe de Pan, The Shape of Water et même L'échine du diable!