Du duo qui nous a donné La grande séduction arrive une histoire de vengeance inégale, décidément moins efficace, et qui donne l'impression d'être incomplète. On n'est peut-être pas allé au bout de l'envie de changement, reste que le film souffre de plusieurs incohérences et de décisions injustifiées.
Si Jean-François Pouliot et Ken Scott retournent faire du vélo en tandem avec ce nouveau film, le Guide de la petite vengeance, ils s'engagent sur une toute nouvelle route bien plus sinueuse, ne serait-ce que par l'humour tordu qu'ils choisissent d'utiliser. Et avec toutes ses courbes, on aura de la difficulté à rejoindre le public, d'autant que celui de La grande séduction perdra rapidement la plupart de ses repères. On ne s'ennuie pas, bien entendu, avec l'humour de Ken Scott, mais on a quelques réserves à formuler au niveau du développement dramatique.
Bernard est comptable à la Bijouterie Vendôme. Avec un patron manipulateur qui le force à travailler tard, à faire des manigances fiscales et à arracher des affiches, il n'est plus l'ombre de lui-même. Mais il fait la rencontre de Robert, ancien comptable chez Vendôme, qui lui explique qu'il est la victime d'un meurtre psychologique, sans cadavre ni arme du crime. Et pour se libérer de son statut de victime, il faut une petite vengeance, c'est-à-dire voler la bijouterie.
Le scénario emprunte dès le départ un ton didactique pour expliquer le malaise bien complexe dont souffre Bernard. Mais avant même qu'on ait pu voir ce malaise naître de visu, on a déjà dégainé l'épée vengeresse, pour expliquer que la taille n'a pas d'importance, que la petite vengeance vaut tout autant que la grande, et que ce méchant Vendôme, parce qu'on vous le dit, le mérite bien. On se serait sans doute beaucoup plu à voir se perpétrer les manigances du patron manipulateur plutôt qu'à se le voir suggérées par clins-d'oeil. Alors on n'a que bien peu d'intérêt à ce que Bernard réussisse sa petite vengeance, d'autant que tant qu'à tenter de se libérer de l'emprise d'un dangereux manipulateur pour aller se jeter dans les bras d'un « psychopathe manipulateur », ce n'est pas très purgatif.
Et le scénario ne perd jamais ce ton pédagogique, où toutes les actions sont justifiées dans la réalité et sans nécessité. Bernard doit changer, car sa femme et sa fille le quittent. Il ne peut pas sortir par la porte avant, tout simplement, parce qu'elle est bloquée. Il veut partir au Mexique parce que c'est là qu'il a dit qu'il irait quand il était adolescent. Bon, c'est le même Bernard qui vit avec un ami invisible que personne ne remarque. À ce sujet, on a longtemps eu l'impression qu'on nous referait le coup de Fight Club.
L'humour de Ken Scott touche souvent la cible, cependant, avec quelques belles trouvailles humoristiques et les interprétations sont efficaces, si bien que le Guide de la petite vengeance est un agréable moment à passer. Si la taille n'a effectivement pas d'importance, il faudrait tout de même ajouter qu'il n'y a pas de petits et de grands films, ni de films populaires et de films d'auteur, il n'y a que des films assumés et des films non-assumés. Celui-ci ne l'est pas assez. Pas assez de « haine en mouvement », pas assez de vengeance. Pas assez d'humour noir, si c'est ce qu'on voulait faire, et pas assez jouissif.
Du duo qui nous a donné La grande séduction arrive une histoire de vengeance inégale, décidément moins efficace, et qui donne l'impression d'être incomplète. On n'est peut-être pas allé au bout de l'envie de changement, reste que le film souffre de plusieurs incohérences et de décisions injustifiées.
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