Goon et sa suite font partie de ces plaisirs coupables qu'on n'avoue pas avoir aimés trop fort. Parce que d'un point de vue purement théorique, il n'y a rien de particulièrement pertinent ni même d'original dans la franchise Goon. Sans cette version française excessivement vulgaire et déplacée, Goon et Goon : Last of the Enforcers perdraient tout intérêt. Heureusement, quelqu'un a eu cette brillante idée de faire un Slap Shot du 21e siècle et ainsi sauver Goon de la perdition à laquelle il était voué.
Encore une fois ici, on peut entendre des répliques délicieuses et mémorables comme « C'est plus serré qu'une noune de soeur » et « Votre père ne vous brisera pas le coeur; il va le sortir par la gorge, puis vous l'enfoncer dans le cul ». C'est plutôt rare que la version française d'un film en langue originale anglaise s'avère plus drôle et divertissante que l'originale, mais ici, il n'y a pas de doute, la traduction fait le film. Bien sûr, il faut être dans un certain état d'esprit pour apprécier un doublage - volontairement - décalé et une grossièreté - elle aussi volontaire - extrême. Oreilles sensibles s'abstenir!
Le film ne ménage pas non plus le spectateur en ce qui concerne la violence, qui est ici magnifiée. Les scènes de combat (notamment celle du tout début) sont d'une brutalité décapante. Le sang gicle abondamment et l'animosité entre les joueurs est explosive, presque perverse.
Seann William Scott insuffle à son personnage une candeur et une bêtise proportionnées qui nous permettent de nous attacher à ce pauvre d'esprit chargé de bonnes volontés. Le côté nigaud de Doug Glatt sert bien l'aspect comique de l'oeuvre. Les emmerdes du joueur de hockey génèrent bien des sourires et parfois des rires sincères. Marc-André Grondin joue un rôle moins important dans ce film que dans la première mouture. Il n'apparaît à l'écran qu'en de très rares occasions. Reste que son interprétation est juste et crédible dans ce contexte absurde. Wyatt Russell fait, de son côté, un joueur de hockey excessivement convaincant; l'acteur américain a, sans aucun doute, le physique de l'emploi! Son jeu décalé et brutal contribue également à l'efficacité comique du film.
Jay Baruchel, qui est ici acteur, réalisateur et scénariste, fait du bon travail derrière la caméra. Les scènes sur la glace renferment l'intensité nécessaire et les situations de la vie quotidienne sont suffisamment cocasses. Son personnage de Pat est le plus absurde de tous. Sa vulgarité n'a d'égal que son manque de savoir-vivre. Impossible de ne pas être légèrement dégouté par ce type outrageusement déplacé!
Si vous avez apprécié le premier Goon, vous serez certainement emballé par cette nouvelle proposition, aussi irrévérencieuse que l'originale. Pour apprécier l'insolence de l'oeuvre à son paroxysme, il faut voir la version française. Parce que le mot « fuck » a des limites que nos nombreux sacres dépassent sans effort. Un « Tabarnak d'osti de criss » assumé, prononcé par un acteur américain doublé, a un impact que l'anglais n'atteindra jamais. Encore là, précisons-le, il ne faut pas avoir l'oreille sensible, car les risques de perforation du tympan chaste sont particulièrement élevés.