La mythologie entourant le personnage de Godzilla et les sommes considérables requises à sa création rendent sa présence au cinéma très délicate et très risquée. Un film de cette ampleur a besoin d'un public aussi large et diversifié que possible pour faire ses frais - voilà qui complexifie encore davantage l'exercice (disons que ce qu'en a fait Roland Emmerich en 1998 (Godzilla) n'aide pas non plus) qui devra donc être « grand public ». Voilà qui sous-entend des obligations avec lesquelles Gareth Edwards (le réalisateur de Monsters) n'a de toute évidence pas su composer.
Son Godzilla, malgré des effets spéciaux de grande qualité, propose un divertissement vide et élémentaire, misant sur les mêmes réflexes spectatoriels que tous les autres films du genre. Nommément : un sentimentalisme primaire, une musique insupportable et omniprésente, un héroïsme déplacé et une réduction du danger au plus petit dénominateur commun (ce phénomène où des centaines de figurants peuvent mourir dans d'atroces souffrances, tant que nos héros sont saufs). Le résultat est aussi monotone que peut l'être un film de Godzilla où le monstre mythique, héros de tellement de films japonais depuis 60 ans, est à peine un personnage secondaire.
Cette idée saugrenue de créer des monstres-ennemis se « nourrissant » à la radioactivité est tellement brouillonne et plaquée (les ogives nucléaires ont un format idéal pour être avalées) qu'il n'y a jamais le moindre enjeu, d'autant que cela place Godzilla, le monstre du titre, dans une position d'observateur, de héros et de défenseur de l'humanité (pourquoi?), très loin du coeur du récit. Les « méchants » monstres (par rapport au « gentil » Godzilla), sont également des créatures illogiques ne s'inscrivant dans aucune conception probante de la nature (ils volent, ils pondent, ils se nourrissent de radiations, ont l'air d'arachnides, détruisent des choses pour s'amuser), ce qui annihile tout l'effet des discours sur l'équilibre du monde et qui laisse entrevoir un certain niveau d'improvisation. Le combat final, qui se veut pourtant épique, rappelle bêtement Transformers, Pacific Rim (évidemment) et même Man of Steel avec ses revirements eux aussi attendus.
Les émotions de base du spectre sont aussi convoquées par une trame narrative bourrée de personnages tous plus inutiles les uns que les autres (les scientifiques servent à transmettre de l'information, les figurants servent à être écrasés et les « héros » à émouvoir) qui est bientôt accablée de longueurs. Les acteurs ne sont ni bons ni mauvais, ils ne font qu'apparaître, jouant sur un même ton une fausse tension.
Il ne reste plus que les effets spéciaux. Mais en ce qui me concerne, ce film est déjà oublié.