Près de huit ans après le délicat Familia (que j'aimerais bien revoir; j'ai prêté mon DVD à quelqu'un, pourriez-vous me le ramener SVP?), la réalisatrice Louise Archambault propose avec Gabrielle un film cohérent et émouvant, qui respecte ses personnages et du même coup ses spectateurs. Et qui mise presque exclusivement sur la beauté simple d'une belle histoire. Histoire d'amour, histoire de liberté, d'autonomie, de normalité. L'amour, c'est toujours normal. Gabrielle met le bonheur à l'avant-plan, avec tout ce que cela implique d'humilité, de sensibilité et d'humanité.
L'humilité, elle vient de la réalisatrice, qui sait se mettre au service de son récit en évitant une mise en scène trop ostentatoire; la sensibilité vient du récit, justement, doux, empathique, délicat. Et l'humanité vient de Gabrielle Marion-Rivard, la « vedette » du film, qui incarne une jeune femme lumineuse et vivante, qui est la parfaite compagne du spectateur dans ce récit touchant sur l'amour « ordinaire ». D'ailleurs, la plupart des intrigues ne la concernant pas directement s'avèrent bien moins porteuses.
Il ne faudrait surtout pas passer sous silence cependant le travail d'Alexandre Landry, qui incarne avec sensibilité un handicapé intellectuel, Martin, de qui Gabrielle tombe amoureuse, avec finesse et sans cabotinage; un tour de force. Les comédiens sont tous efficaces, ce qui revient à souligner que le travail de la réalisatrice pour les diriger était particulièrement juste. Mélissa Désormeaux-Poulin, entre autres, démontre une nouvelle fois le naturel et la crédibilité de son jeu.
Derrière la caméra, Louise Archambault sait capter des moments, des rencontres, des gens, et elle le fait avec une caméra pénétrante qui évite de forcer, de provoquer. Les forces du récit et de l'interprétation en sont alors davantage soulignées, et les émotions qui risquent de rejoindre le public encore renforcées. Ces points de rencontre entre le public et le film sont nombreux au sein du film, on ne manquera pas de le souligner.
Gabrielle a tout de même un ou deux défauts, comme quelques flottements narratifs qui allongent inutilement le récit (une promenade où Gabrielle s'égare, tout particulièrement), ou des séquences musicales tirant parfois vers « la musique filmée » plutôt que vers le cinéma, lors des quelques apparitions d'un « chanteur populaire ». La musique de Robert Charlebois ajoute au récit et permet d'être témoin du talent incroyable des chanteurs handicapés, mais l'omniprésence de la musique dilue un peu le récit. De plus, des personnages et des trames narratives sont abandonnées en chemin; sans grand impact toutefois sur la trame principale. Ce qui revient presque à dire que tout ce qui compte, c'est Gabrielle et Martin.
Et au fond, c'est le cas. Un très bon film, rassembleur, Gabrielle est l'histoire de Gabrielle, et la grande réussite de ce film aura été de permettre la rencontre entre elle et le public.