Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett ont pris tout le monde par surprise l'an dernier en ressuscitant la série Scream, onze ans après le dernier effort signé de la main du défunt Wes Craven.
La question était d'abord de savoir ce que les réalisateurs de Ready or Not seraient en mesure d'amener au moulin pour raviver une franchise dont nous pensions avoir déjà plus que fait le tour.
Au final, la formule demeurait essentiellement la même, mais le duo parvenait malgré tout à aposer sa signature à quelques endroits spécifiques pour offrir un suspense prévisible, mais suffisamment divertissant et rondement mené.
Bettinelli-Olpin, Gillett et les scénaristes James Vanderbilt et Guy Busick semblaient toutefois beaucoup plus intéressés à souligner le piètre état des productions hollywoodiennes au sens large qu'à méditer sur les mécanismes du cinéma d'horreur en tant que tel.
Et c'est toujours le cas ici.
Le tout par l'entremise de nouveaux personnages, mais des mêmes manies scénaristiques et stylistiques, et des mêmes séquences réflexives obligatoires qui étaient déjà devenues redondantes après le deuxième épisode.
Scream VI s'impose comme une suite directe à l'opus précédent. les quatre survivants du dernier massacre de Woodsboro habitent désormais la Grosse Pomme, où ils tentent chacun à leur façon de retrouver une vie normale.
Ce changement d'air est définitivement le bienvenu et, dès l'excellente séquence d'ouverture, nous sentons la volonté des maîtres de cérémonie d'aller à contre-courant des propositions précédentes. Plusieurs éléments flirtent d'ailleurs davantage avec l'essence des Halloween de David Gordon Green que celle de Scream.
Le côté nonchalant et cartoonesque de Ghostface est une fois de plus évacué dans la mesure du possible pour nous offrir un tueur réellement imposant, sadique, brutal et menaçant.
Scream VI présente également un discours pouvant particulièrement résonner dans le contexte social actuel lorsque Tara Carpenter (Jenna Ortega) exprime très clairement sa volonté de ne pas laisser quelques jours - aussi cauchemardesques et traumatisants puissent-ils avoir été - guider et teinter le reste de son existence.
Un désir de ne pas s'identifier comme une victime que la jeune Ortega défend avec beaucoup d'aplomb.
De son côté, sa soeur Sam (Melissa Barrera) continue d'être tiraillée par l'héritage de son père psychopathe, alors que quelques langues sales ont répandu sur les réseaux sociaux la théorie avançant que ce serait elle qui aurait orchestré le plus récent massacre de Ghostface.
D'ailleurs, à ce stade-ci de la série, Scream doit être approché avant tout comme un jeu d'évasion pour cinéphiles.
On ne parle plus à présent des règles pour survivre dans un scénario d'épouvante, mais plutôt de celles pouvant nous permettre d'identifier rapidement l'assassin.
Et Bettinelli-Olpin et Gillett donnent certainement la chance aux spectateurs de mener leur propre enquête et de deviner l'identité du ou des coupables plus souvent qu'à leur tour.
Là est tout l'intérêt, diront certains.
En route vers les révélations finales d'usage, Scream VI présente son lot de scènes de suspense et de carnage bien ficelées et particulièrement efficaces, mais aussi d'opportunités manquées.
La témérité affichée au départ laisse progressivement toute la place aux lieux communs. Le deuxième film de ce redémarrage est calqué de bien des manières sur le second de Wes Craven - et il ne s'en cache jamais, d'ailleurs.
La stratégie demeure aussi la même que dans le film précédent, soit tout mettre en place pour convaincre le public que les hypothèses les plus plausibles ne sont pas les bonnes, plutôt que de réellement créer un effet de surprise qui tienne la route.
En ce sens, Scream VI se dégonfle passablement durant le dernier acte, alors que la finale aux accents théâtraux poussés à la puissance dix donne lieu à une révélation peu surprenante, un motif d'un ridicule absolu, des performances risibles, et la disparition des quelques notions de réalisme qui avaient survécu jusque-là.
Soyez sans craintes, les amis, se faire éventrer ou poignarder à plusieurs reprises n'est guère plus douloureux ou dommageable en 2023 que de se piquer le bout du doigt avec une aiguille en faisant de la couture.
Slasher ou film de super-héros? La ligne est étonnamment mince. Même l'humour est beaucoup moins noir et sarcastique qu'auparavant, et sert davantage à désamorcer des situations trop tendues ou dramatiques comme dans un film de Marvel.
Dommage, car ce qui précède a suffisamment de gueule et de répartie pour nous tenir en haleine et alimenter un réel intérêt pour l'intrigue. Mais à force de se noyer dans l'autoréférence et de tasser du revers de la main toutes conséquences durables, Scream VI finit par répéter les tendances et les mauvaises habitudes qu'il s'efforce de critiquer.
À mi-chemin entre l'original et le troisième épisode.