La musique adoucit les moeurs. Ce proverbe popularisé par Platon et Aristote s'applique parfaitement à Flora and Son, un charmant petit film qui fait amplement sourire.
Flora (Eve Hewson) tente du mieux qu'elle peut pour élever son fils adolescent Max (Orén Kinlan). Turbulent, ce dernier risque de se retrouver en maison de redressement, à moins qu'il ne s'adonne à un passe-temps - ou mieux encore, qu'il développe une passion - qui calmera ses ardeurs. Pourquoi pas la musique?
Ce long métrage semble voguer vers le drame social et familial popularisé par Ken Loach et Andrea Arnold. Celui où le milieu semble peser sur l'individu, créant moult difficultés qui risquent d'hypothéquer à jamais son avenir. Cet univers ne vient pas sans clichés qui ne sont pas totalement évités, bien que la peinture du Dublin contemporain ne manque pas de justesse.
Les jours noirs et gris n'asservissent pourtant jamais le récit. L'espoir demeure dans le collimateur et il se matérialise par les apprentissages musicaux qui permettront à tout un chacun de devenir meilleur. C'est le cas du fils adepte de musique électronique, et même de sa mère qui s'initiera à la guitare acoustique. Ils finiront par mettre leurs différents de côté et à se rapprocher, en écrivant et en composant une pièce qui pourrait même être interprétée sur scène.
Le scénario n'est pas le plus profond ou le mieux défini. Il part parfois dans toutes les directions et peine à respecter ses promesses, ouvrant plein de portes et de possibilités intéressantes sans les refermer ou les explorer. Surtout qu'il peut paraître naïf, ressemblant à un feel-good movie qui tente de terrasser le cynisme ambiant.
Les histoires ont toujours été secondaires dans la filmographie du réalisateur et scénariste John Carney, qui s'est fait connaître avec la délicieuse romance musicale Once. Ce sommet constituait les modèles de ses mignons Begin Again et Sing Street, et il sert à nouveau de canevas ici. Les protagonistes arrivent à s'exprimer en chansons et ce sont ces dernières qui mènent le bal, devenant le fil directeur de l'oeuvre.
Tout ce qui concerne Flora semble touché par la grâce et l'émotion coule à flot. C'est notamment le cas quand elle décide de suivre des cours de guitare à distance. Les échanges avec son professeur déchu de Los Angeles (incarné par Joseph Gordon-Levitt) sont savoureuses et les mélodies pop folk restent en tête.
Ce n'est malheureusement pas le cas des pièces électro rap de son fils, qui s'avèrent beaucoup plus quelconques. Bien que les mots décrivent son état d'âme, la construction musicale laisse à désirer. Surtout de la part de Carney, qui a habitué le spectateur à mieux par le passé.
Cela se fait ressentir dans sa mise en scène. Elle est élégante quand maman côtoie son enseignant, rompant l'éloignement des corps par une union des âmes (le prof commence à jouer sur l'écran de l'ordinateur et il surgit soudainement dans la réalité aux côtés de l'héroïne). Mais elle apparaît plus banale et redondante quand l'adolescent se met à créer.
La performance du jeune Orén Kinlan n'est pas en cause. Tout comme celle de l'ensemble de la distribution. Tout le monde joue juste et cela fait des années qu'on n'a pas vu Joseph Gordon-Levitt avoir autant de plaisir. C'est toutefois Eve Hewson qui livre la prestation la plus aboutie, la plus riche et décontractée. La fille de Bono (le chanteur de U2) possède du charisme à revendre, un bon sens de l'humour et la voix appropriée pour rendre crédible et attachant ce personnage qui aurait facilement pu être irritant.
Flora and Son s'apparente à un mignon cocon où l'on voudra se lover l'espace de quelques chansons. Une bulle de bonheur fragile, ludique et éphémère qui rend le coeur plus léger.