Pour les amateurs de comédies et d'humour (qui n'aime pas rire?), Jason Segel bénéficie d'un fort capital de sympathie. Avec HIMYM, l'inoubliable Forgetting Sarah Marshall ou même The Muppets, l'acteur américain s'est forgé une solide réputation. Tant et si bien qu'on se demande quel concours de circonstances ou quel pari perdu l'a placé au sein de cet exécrable Sex Tape (il en est pourtant le co-scénariste), une comédie sans saveur et sans invention qui rate à peu près toutes les opportunités qu'elle se donne. Ratage inexplicable qu'on a d'autres choix que d'attribuer à Jake Kasdan, aussi responsable de l'indicible Bad Teacher.
Sex Tape est pourtant un film qui a beaucoup à offrir. Situation loufoque, contexte inédit (la technologie permet depuis peu de rendre cette prémisse crédible, le long métrage choisit plutôt de faire l'infopub des produits Apple), tous les éléments étaient en place pour une comédie irrévérencieuse (même le classement de la Régie du cinéma, un « 16 ans et + » assez sévère) à aucune autre pareille. Malheureusement, il n'en est rien.
Il aurait à tout le moins fallu que le film assure pleinement son sous-texte sexuel grivois et dévergondé pour que déjà l'humour se démarque. On a plutôt droit à un ressassement des blagues les plus prévisibles et les plus grossières qu'on puisse imaginer avant de bêtement tomber dans le burlesque (une séquence in-ter-mi-na-ble avec un chien, en particulier), le scénario étant de toute évidence construit autour du concept plutôt que l'inverse. Et dans un récit qui a autant besoin de la technologique pour même exister, comment expliquer que les personnages comprennent aussi mal le fonctionnement d'un ordinateur?
Les interprètes sont à peine potables. Dans les circonstances toutefois, ils ne sont certes pas ceux à blâmer, la direction étant clairement déficiente. Segel n'est pratiquement jamais drôle, malgré des efforts évidents; plutôt que de proposer des observations aussi fines que déstabilisantes sur les tares inavouables des couples, sur leurs travers et leurs fautes partagées, le voilà plutôt qui se jette d'un balcon ou qui fonce dans une porte de garage avec une minivan. Cameron Diaz n'a quant à elle pas le talent comique pour soutenir le rythme, quoiqu'il s'agit d'un problème généralisé lié à un montage complètement raté. On voit les gags, on constate leur construction, mais ils ratent pratiquement tous la cible. Les apparitions de Rob Corddry, Ellie Kemper et Rob Lowe viennent sauver quelques scènes, sporadiquement, mais le long métrage les abandonne en même temps que son intrigue principale en deuxième moitié pour aller faire l'inventaire de sites pornos dans une salle des serveurs.
Sex Tape est un ratage sans équivoque qui au d'autant plus désolant qu'on y voyait un potentiel évident. Il y avait beaucoup à dire et beaucoup pour faire rire dans un film sur un sujet aussi d'actualité. Le long métrage préfère remâcher des morales à deux sous sur le couple et l'amour. Sauf qu'un film qui parlerait de sexe, mais vraiment de sexe, et de vrai sexe, comme de quelque chose qui n'est pas seulement prétexte à se ridiculiser, ça, ça serait vraiment génial. Une autre fois.