Le cinéma hollywoodien au féminin est en train de reconquérir l'espace qu'il lui est dû. On le voit seulement avec Wonder Woman, qui remporte un succès commercial et critique pleinement mérité. La crainte est de le voir tomber dans les mêmes travers que son pendant masculin. Un piège que n'a pas su éviter Rough Night.
Il ne s'agit en fait que d'une version avec oestrogènes de The Hangover. Des amies délirent ensemble au long d'une nuit qu'elles vont rapidement regretter. Tous les hommes sont mous, méchants ou obsédés, alors que les différents personnages finiront par se faire exploiter. Renverser les clichés attendus est une bonne idée, faut-il seulement le réaliser avec compétence.
Les héroïnes s'avèrent de véritables stéréotypes ambulants et les talentueuses actrices ne peuvent rien pour elles. Tour à tour éteintes (Scarlett Johansson, Zoë Kravitz) ou énervantes (Jillian Bell, Ilana Glazer), il n'y a pratiquement que l'omniprésente Kate McKinnon qui fait sourire avec son accent australien. Quant à l'oubliée Demi Moore, ce n'est pas ce rôle qui va la remettre sur la carte.
Formée à la télévision au sein de la sympathique émission Broad City, Lucia Aniello ne sait pas trop quoi proposer avec sa mise en scène qui manque singulièrement d'attrait. Techniquement, cela ressemble à des centaines d'autres comédies et sa vision ne paraît guère inspirée.
C'est le cas également de son scénario, concocté conjointement avec son amoureux Paul W. Downs. Il est question d'amitié et de solidarité féminine à la Bridesmaids, mais avec encore plus de bons sentiments. Surtout lors de la résolution finale qui est littéralement traitée sous la forme de la caricature.
Si l'on pouvait s'attendre à une critique/satire sociale sur le sexisme et même sur l'Amérique à la façon de Spring Breakers, la superficialité la plus crasse a tôt fait de prendre le dessus. Ce cadavre impossible à cacher renvoie directement à Weekend at Bernie's, alors que la fausse noirceur du propos est bien fade à côté de celle de Very Bad Things qui fêtera bientôt son 20e anniversaire. Rough Night avait la possibilité d'aller loin dans sa façon de s'affranchir des codes de la farce anonyme. Mais tout ce qu'il fait est de les reproduire un à un.
Cela n'empêche pas quelques situations de briller par leur mordant. C'est le cas de cet improbable trip à trois ou de quelques moments loufoques plus imprévisibles. Ils ne donnent toutefois pas de direction à ce brouillon particulièrement inégal, parsemé d'allusions sexuelles les plus élémentaires (encore une fois, le simple mot « pénis » est tout ce que ça prend pour rendre hilare les gens dans une salle de cinéma). Le langage crû n'est plus une émancipation, mais une béquille à un humour souvent défaillant.
Rare long métrage vulgaire réalisé par une femme à provenir d'un grand studio américain, Rough Night ne porte en lui aucune identité. Le même vieux modèle a été reproduit et peu importe le genre de son cinéaste, cela ne demeure pas un film très concluant tant le rire est trop souvent absent.