Il est toujours intéressant de voir des films historiques, donc, inspirés d'histoires vraies, dont nous ignorions la teneur avant la projection. Probablement que cette rencontre en huis clos qui a épargné l'annihilation à Paris est connue de plusieurs, mais pour ceux qui, comme moi, n'était pas conscients que la Ville lumière a failli disparaître sous les cendres un jour de mai, Diplomatie est d'autant plus fascinant. Évidemment, comme tout bon film historique, ce n'est pas la surprise à laquelle le public s'attend; nous savons quelle décision prendra le général allemand, mais c'est son processus de réflexion qui nous tient en haleine, les débats moraux qui l'animent et sa force tranquille.
Comme le film n'en est pas un d'action ni de suspense, et que ce n'est pas les paysages qui s'expriment ou les jeux de caméra, tout repose sur les épaules des deux acteurs principaux, chargés de meubler la situation. Nous en étions déjà convaincus, mais nous en sommes maintenant plus que persuadés; André Dussollier et Niels Arestrup sont des comédiens formidables. Ils arrivent à développer une synergie extraordinaire dans ce drame politique, historique et social. Plus les minutes s'écoulent, plus leurs personnages se fragilisent. Les deux hommes sont rongés de remords et de dilemmes; chacun s'efforce de convaincre l'autre de l'importance de sa position, même s'ils sont conscients de la logique des arguments de leur adversaire. On s'imagine très bien que la vraie situation a pu se dérouler ainsi en 1944.
D'ailleurs, le réalisateur Volker Schlöndorff a porté une attention toute particulière au réalisme. Même si le diplomate suédois et le militaire allemand discutent en français, la plupart des autres dialogues sont en allemand. Les plans assez conventionnels laissent toute la place aux acteurs, et le huis clos concède une grave intensité à la scène qu'aucun montage nerveux n'aurait pu égaler. Peut-être que l'effet dramatique aurait pu être encore plus efficace si le réalisateur avait choisi de faire davantage confiance au silence plutôt que de plaquer une musique classique prétentieuse sur l'angoisse de certaines séquences.
Le film a aussi le pouvoir de faire réfléchir le spectateur, de se mettre dans la position du général qui, si Paris n'explose pas, verra sa famille se faire exécuter. Il demande au diplomate ce qu'il ferait, lui, s'il se trouvait à sa place, et questionne ainsi le spectateur, qui finit par cogiter sur ses propres valeurs et vertus. La courte durée du film permet aussi une meilleure immersion dans son univers. Nous n'avons jamais l'occasion de reculer, de nous détacher de cette histoire passionnante et historiquement importante. C'est aussi risqué de faire un film de presque trois heures que de faire un film de moins d'une heure trente. Si le premier est souvent qualifié de lourd et d'essoufflant, le second est généralement critiqué pour son manque de sérieux et de profondeur. Un piège que Diplomatie évite avec beaucoup de lucidité.
Diplomatie est un film magnifique, qui nous permet un point de vue différent des Allemands au sein de la Seconde Guerre mondiale. Une optique différente est d'autant plus salutaire lorsqu'elle propose un antihéros à la fois fragile et valeureux comme elle le fait ici...