Au rayon des films de superhéros, Deadpool est dans une classe à part. Il est le seul à se moquer de tout et surtout de lui-même, à user d'une violence sanglante et d'un langage ordurier. Le premier long métrage qui est sorti en 2016 a tellement cartonné qu'une suite allait inévitablement voir le jour. Et quelle campagne publicitaire pour le second volume! Avec sa pré-bande-annonce qui s'inspirait de Flashdance et la chanson de Céline Dion, il y avait tout pour créer des attentes surhumaines. Même à oublier les nombreux problèmes qui entachent la production depuis belle lurette...
- Le héros Ryan Reynolds, qui agit également en tant que producteur et coscénariste, a eu la peau du cinéaste du premier tome, Tim Miller, remplacé pour « divergences artistiques ».
- Une cascadeuse est morte pendant le tournage lors d'une scène dont la sécurité a été jugée déficiente.
- Même s'il a été accusé d'inconduites sexuelles, on n'a pas décidé de remplacer l'acteur T.J. Miller. Ridley Scott a pourtant fait disparaître Kevin Spacey avec un délai beaucoup plus serré sur All the Money in the World.
Mais trêve de bavardage : que vaut Deadpool 2 dans tout ça? Les amateurs seront comblés, parce que c'est presque la même chose que l'original. On a toujours affaire à un personnage insolent, désinvolte et cynique qui s'amuse à briser le quatrième mur en s'adressant directement aux spectateurs. Un antihéros au charisme certain, toujours campé avec entrain par Reynolds. C'est méta et ça s'assume complètement.
Évidemment, l'aspect nouveauté n'y est plus. Le générique d'ouverture n'est pas aussi mémorable que le précédent et les cinéphiles se sont habitués à ce ton particulier, qui pourrait paraître étrangement sage par moment. Surtout que les défauts antérieurs ont été à nouveau reproduits. Le désir de choquer et d'être politiquement incorrect est tellement grand que l'effort en devient ainsi prévisible et beaucoup trop calculé.
L'histoire qui est cette fois calquée sur Terminator 2 n'est qu'un prétexte pour rire de tous les films de superhéros qui l'ont précédé. On se moque allègrement de Marvel et DC Comics, notamment avec une allusion savoureuse aux deux Martha du piètre Batman v Superman. Les références cinématographiques abondent et il faut entendre le protagoniste lancer « quel est ton pouvoir? L'appropriation culturelle? ». Les gags s'avèrent peut-être faciles (le Canada en prend pour son rhume), mais ils touchent néanmoins la cible en plus d'une occasion, faisant jubiler allègrement. La séquence en parachute et le générique final risquent d'ailleurs de devenir culte.
Ayant bénéficié d'un budget plus considérable, cette suite mise sur des scènes d'action de meilleure qualité. La réalisation de David Leitch (Atomic Blonde) est toutefois un peu trop léchée, aseptisant du coup le côté brut et fauché de l'original. Cette propension à valoriser le spectaculaire permet aux personnages de s'imposer. C'est particulièrement le cas de Cable, campé par le toujours excellent Josh Brolin, que Reynolds finira par appeler Thanos, le nom du méchant qu'il interprétait dans Avengers: Infinity War!
Fait du même bois que son prédécesseur, Deadpool 2 s'adresse aux fans qui raffolent de cet humour outrancier et qui ne demandent rien de nouveau en retour. Ceux-là s'amuseront énormément, alors que les autres ne comprendront toujours pas en quoi ce personnage est aussi marginal qu'on le prétend, surtout à côté de figures plus singulières que l'on retrouve par exemple dans un film comme Super de James Gunn (les deux Guardians of the Galaxy). Que l'on soit adepte ou détracteur, il sera pourtant difficile de rester indifférent devant les dialogues, qui insufflent une irrévérence que l'on retrouve peu dans les superproductions ambiantes. Cela n'aurait pas pu être plus différent du dernier épisode des Avengers.