Après un premier film endiablé qui laissait entrevoir une renaissance de qualité de la célèbre licence Rocky, Creed II met K.O. tous les bons espoirs fondés envers cette série.
À sa sortie en 2015, Creed a remporté un vif succès populaire et critique. Sans réinventer la roue, ce long métrage explosif savait jouer de nostalgie en actualisant avec grande efficacité une formule gagnante. Une suite devait évidemment voir le jour et elle n'est malheureusement pas à la hauteur.
Ce n'est toutefois pas immédiat dans les premières minutes du nouveau chapitre, qui tiennent en haleine en replongeant le spectateur directement dans l'action. Les personnages intéressants sont de retour, tout comme le style visuel immédiatement reconnaissable.
Cela ne prend pas tellement plus qu'un quart d'heure avant de constater que le récit fait du surplace. Le scénario de Sylvester Stallone (il n'avait pas écrit l'effort antérieur) met davantage l'accent - oui, c'est possible - sur les querelles familiales, palpant allègrement la tragédie grecque avec ces relations troubles entre les patriarches et leurs enfants, alors que les actions du passé viennent hanter le présent.
Ce désir d'élever les enjeux ne fonctionne guère, car l'histoire manque cruellement de punch. En fait, il ne s'agit pas tant d'une suite à Creed qu'à Rocky IV, alors que Adonis Creed (Michael B. Jordan) doit affronter un féroce boxeur (Florian Munteanu), dont le père (Dolph Lundgren) a tué sur le ring papa Creed il y a plus de trois décennies!
Un canevas de base riche en émotions fortes qui se manifestent trop rarement à l'écran. Entre les discussions en famille, les sermons de Rocky, les entraînements éprouvants et les affrontements musclés, tout a déjà été vu maintes fois auparavant... et de la même façon en plus de ça. Les répétitions mènent le bal, s'enlisant dans des dialogues à deux sous, des excès mélodramatiques et un sentimentalisme éprouvé, dont la finale exacerbée finit noyée dans le sirop le plus collant.
Au moins, il y a les (trop rares) combats pour raviver la flamme. Le dernier est d'ailleurs divertissant à souhait, avec son montage rythmé et ses mélodies endiablées. Accaparé sur Black Panther, le réalisateur du précédent tome, Ryan Coogler, a dû déclarer forfait, remplacé par Steven Caple Jr. (potable The Land). Cela se fait ressentir au niveau de la mise en scène, beaucoup moins dynamique, où ses spectaculaires plans-séquences sont remplacés par des enchaînements nettement plus conventionnels et attendus.
Michael B. Jordan n'a cependant rien perdu de sa forme, ayant toujours l'étoffe des héros. La romance qu'il forme avec l'exquise Tessa Thompson offre d'ailleurs son lot de moments mignons. En vieux nounours attendrissant, papy Sly demeure émouvant. Mais comme la maladie ne semble plus ronger son personnage, ce serait surprenant de le revoir nommé aux Oscars. Il n'y a rien d'aussi soigné chez leurs adversaires russes, de véritables caricatures de rugissements, de sueur et de testostérone. L'ex-madame Stallone, Brigitte Nielsen, fait même une apparition en maman du méchant!
Peut-être que derrière ses clichés à la tonne, il faut décoder ce film comme une simple oeuvre de propagande. Pour plusieurs cinéphiles, c'est Rocky IV qui a sonné le glas de l'URSS et du communisme. Puisque les relations entre les États-Unis et la Russie ne sont pas au beau fixe (un euphémisme, surtout depuis la dernière élection américaine), c'est à Creed II de sauter dans la mêlée en mettant son éternelle Némésis dans les câbles. Encore là, l'issue du combat est prévisible... mais il s'avère un peu plus excitant d'un point de vue politico-historique.