Premium Rush est victime d'un phénomène étrange qui affecte ces longs métrages confinés à leur seule et unique bonne idée. Confusion des genres, coïncidences forcées et thématiques convenues en sont habituellement le lot. Dans ce cas-ci, la bonne idée, c'est le personnage, celui d'un messager à vélo casse-cou, sillonnant les rues de Manhattan sur un vélo sans embrayage ni freins. L'ajout d'un mystérieux inconnu voulant mettre la main sur un colis qu'il transporte est assez bien trouvé aussi; c'est après, quand il faut « justifier », que les aberrations commencent. Et que le plaisir diminue proportionnellement.
Thématiques éculées, fausses pistes cheap et flash-backs surexplicatifs viennent donc miner l'excellente mise en contexte de ce film de David Koepp. Dans les premières minutes, on semble vouloir proposer une folle virée à travers les dangers urbains (et, du même coup, une ode de l'individualisme - pas grave si tu tombes, moi je passe et je continue) fabuleusement rythmée et actuelle (par l'utilisation du ralenti anticipatif). Puis arrivent les redondances, les répétitions et les explications visant à tirer les larmes, qui viennent ajouter une dose de quétaine à ce qui aurait dû être cool.
Disons, pour illustrer sans tout dévoiler, que quand la tension d'un film sur des messagers à vélo mise tout sur un appel simultané entre le Chinatown new-yorkais et la Chine, on est loin de l'essence d'un projet qui promettait d'être essoufflant. On s'est perdu en chemin, pourrait-on dire...
Mais la grande faiblesse du film - qui en fin de compte mine toutes ses chances de s'élever au-dessus du simple divertissement grand public - est son antagoniste, pourtant incarné par un Michael Shannon fascinant. Quel acteur talentueux! Il ne peut pourtant rien faire pour sauver ce personnage stéréotypé et incohérent, un policier-corrompu-joueur-compulsif dont la quête est particulièrement peu crédible. Le rapport de force est tellement faible que la tension interne du film n'est pas aussi forte qu'elle devrait l'être. Ce qui crée les longueurs et le sentiment de redondance. Les personnages secondaires, de vulgaires outils narratifs, sont également particulièrement minces.
Parce qu'on s'intéresse somme toute assez peu aux personnages, les ressorts dramatiques du film ne fonctionnent qu'à moitié. Joseph Gordon-Levitt est encore cool, remarquez, mais c'est parce qu'il fait partie de la bonne idée du film (et que c'est un acteur très habile); heureusement, les cascades sont assez nombreuses. Il est inacceptable, cependant, qu'on remarque si souvent le cascadeur qui prend sa place lors des séquences d'action. Pas subtil du tout.
Premium Rush est donc un film très exactement moyen. Les bonnes idées et les mauvaises se côtoient allègrement, le récit en demi-teinte a des moments forts et des moments faibles, les interprétations sont dans le ton et la réalisation, audacieuse mais pas maîtrisée, connaît aussi des ratés et des moments forts. Moyen, donc. Quétaine mais cool.