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C'est trop serré!
On a tous, enfin les spectateurs d’un certain âge en tout cas, une image de l’impératrice d’Autriche, l’illustre Sissi, véhiculée par les vieux films avec Romy Schneider. Kitchs et romantiques, ils ont infusé l’imaginaire collectif durant des décennies avec ces scènes de ballet majestueuses et ses costumes grandioses tout comme par leur vision très sentimentale et fleur bleue de la souveraine. Ici, et c’est tout l’intérêt de ce « Corsage », on prend le personnage historique complètement à revers à tous niveaux et cela semble bien plus proche de la réalité. D’abord, c’est à une Sissi vieillissante à qui l’on a affaire (elle est dans sa quarantaine et non dans sa vie de jeune femme sortie de l’adolescence) et à une Sissi enfermée dans des conventions qui l’étouffent et ne correspondent pas à son caractère de femme indépendante. Le film est donc dans l’air du temps, profondément féministe. C’est clairement un récit d’émancipation contrariée par les carcans sociétaux de l’époque. Et quelques anachronismes ajoutés à cette vision moderne vont donner un portrait tout autre et très intéressant de ce personnage immensément connu. D’ailleurs, le choix risqué d’offrir au film une bande sonore et des musiques actuelles (précisons-le, de toute beauté) est payant car ce sont ces moments qui donnent au long-métrage ses plus belles séquences. Un peu comme le méconnu et vieux films « Guns 1748 » qui mettait une techno douce sur une histoire se déroulant aux XVIIIème siècle. Ici, on pense à ce bain de minuit éclairé par la lune avec son cousin ou au sublime final sur le bateau. Le constat est simple : dès qu’intervient la musique les images sont hypnotiques.
Malheureusement tout le film n’est pas de cet acabit. Si la métaphore des corsets qui étouffe son corps comme les traditions et les protocoles étouffent son esprit est un peu grossière mais probante, « Corsage » est une œuvre risquée. Si s’attaquer de la sorte à un tel personnage engoncé par des décennies de visions biaisées est méritoire, le film manque d’une ligne narrative claire et s’apparente plus à une succession de moments prouvant ce que veut dire et martèle Marie Kreutzer, la metteuse en scène. De plus on ne peut nier qu’il y a des redondances et que c’est un peu plat et longuet parfois. Si la prestation de Vicky Krieps, qui lui a valu le prix d’interprétation mérité à Cannes dans la section Un Certain Regard cette année, est impeccable et que la reconstitution d’époque est réussie en plus d’être tout sauf poussiéreuse, ce film d’époque au ton résolument contemporain manque étrangement de passion. On aurait aimé en effet être plus emporté et plus touché par les souffrances de cette femme qui aurait certainement voulu naître différemment et vivre ailleurs. C’est beau à regarder, le propos est intéressant mais tout cela manque un peu de chair. Une œuvre téméraire et plutôt maîtrisée donc mais trop froide dont on retient surtout les magnificences musicales sporadiques qui emballent le visuel.
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