Un film d'une grande efficacité, qui souffrira malheureusement des comparaisons avec La neuvaine.
Pour Réjeanne et Gilles, le bonheur est une petite maison près du mont St-Hilaire, avec un grand jardin et vue sur la rivière. Mais quand Gilles est frappé de plein fouet par un accident cardio-vasculaire, Réjeanne doit redoubler d'efforts pour prendre soin de son mari, qui se laisse dépérir. Les choses ne s'arrangent pas quand Réjeanne perd son emploi de téléphoniste pour une multi-nationale qui pratique une restructuration.
Contre toute espérance choisit de présenter son histoire à l'envers. Quand on la rencontre, Réjeanne vient de tirer sur une maison cossue de Westmount et refuse de parler. On découvre bientôt le corps de son mari, inanimé. Cette battante, enfermée dans le mutisme, rumine une grande frustration qu'on dévoilera peu à peu à l'aide de flash-backs. Un choix judicieux d'autant que cela donne un rythme inhabituel au récit, qui souffrirait d'être trop convenu. Parce qu'ici, l'explication finale ne demeure pas mystérieuse longtemps.
La réalité proposée par Émond, qui se fait militant passionné, est moins posée qu'à l'habitude; les bons s'opposent aux méchants, les victimes aux coupables. Le constat final est d'ailleurs un peu simple : ce n'est la faute de personne, aucune plainte n'est portée. Sorte de pitié un peu déplacée. Puis, l'ouverture à Dieu - qui manque d'ailleurs cruellement à cette quête de l'espérance - vient relancer le film vers d'autres questionnements qui devront être abordés dans Les fins dernières, troisième volet de la trilogie qui traitera de la charité.
Émond, en grand humaniste, saisit en dehors des dialogues la relation d'intimité entre les personnages principaux; tant d'abnégation aurait pu sembler un peu irréaliste, pourtant tout demeure crédible, en particulier grâce à l'efficacité de Guy Jodoin et de l'appui de Gildor Roy. Guylaine Tremblay, souvent esseulée, est vibrante et particulièrement convaincante dans ce qui est, quand même, la représentation idéalisée des gens ordinaires.
Contre toute espérance évite le piège du snobisme intellectuel, son amour pour ses personnages et sa grande empathie sont palpables et enrobent la cruauté du récit de beaucoup d'humanité. Même si sa représentation manichéenne le fait trébucher à quelques reprises alors que le film perd un peu de rythme à cause d'un policier grandiloquent, les émotions sont bien présentes et ne demandent qu'à être saisies. Et même s'il est un peu convenu, l'émerveillement face à la nature offre de beaux moments de réflexion sur un plateau d'argent, merci à l'oeil de Jean-Claude Labrecque, dont le travail est toujours aussi pertinent à l'heure du vite-fait et du pré-cuit.
Il semble que Bernard Émond ait voulu, dans ce pèlerinage qu'il mène avec sa trilogie théologale, laisser la place aux autres, les affligés, les malchanceux, pour raconter une de leurs histoires sans histoires. Il a voulu donner toute la place à Guylaine Tremblay, qui la prend merveilleusement. Cela donne une oeuvre moins forte que La neuvaine, mais tout de même très forte et lourde de sens.
Un film d'une grande efficacité, qui souffrira malheureusement des comparaisons avec La neuvaine. Émond, en grand humaniste, saisit en dehors des dialogues la relation d'intimité entre les personnages principaux; tant d'abnégation aurait pu sembler un peu irréaliste, pourtant tout demeure crédible, en particulier grâce à l'efficacité de Guy Jodoin et de l'appui de Gildor Roy. Guylaine Tremblay, souvent esseulée, est vibrante et particulièrement convaincante dans ce qui est, quand même, la représentation idéalisée des gens ordinaires.