Constantine dégage juste assez de mystère et d'ironie pour plaire, et s'avère un voyage initiatique dans les profondeurs de l'Enfer plutôt intéressant. Ce n'est pas l'ensemble de Constantine qui risque de plaire, mais bien quelques-uns de ses meilleurs éléments.
Oh Satan! Prends pitié de ma longue misère! – C. Baudelaire
L'ensemble de Constantine n'est pas satisfaisant. Le film manque de substance, on a vaguement l'impression que ce monde mi-ange mi-démon regorge de références mythologiques terriblement pertinentes et qu'elles ont été écartées. La réalisation se cherche, et semble perdue au purgatoire. La plupart des acteurs ne sont pas éclatants non plus, excepté Rachel Weisz (qui est horrible), pourtant…
Pourtant, Keanu « placide » Reeves, avec son air impassible et son sérieux imperturbable, donne à son personnage de John Constantine, un exorciste, un look d'enfer (!!) et une assurance idéale pour ce genre de rôle. Reeves et sa réputation apportaient leur lot de craintes, qui s'avèrent non-fondées, parce que son air étonné s'applique tout à fait au personnage. Il faut admettre qu'aller en enfer et en revenir pourrait en étonner plusieurs et leur faire voir les banalités de l'existence d'un autre œil, plus impavide.
Les autres acteurs, sauf une Tilda Swinton (The Beach, Vanilla Sky) androgyne particulièrement convaincante, baignent dans le cliché le plus total de bons et de méchants. Weisz, comme mentionné, est irrécupérable, elle ne trouve jamais son rythme, elle régurgite ses répliques sans conviction, elle mine sérieusement la crédibilité du film.
Francis Lawrence réalise son premier film et, même si son travail n'est pas toujours parfait, il ne faudrait pas le condamner à la souffrance éternelle tout de suite. Si sa réalisation n'est ni éclatante, ni remarquable, elle cerne très bien l'histoire et focalise sur les éléments les plus importants de ce monde fascinant de paradis et d'enfer. Plusieurs de ses plans de caméra montrent un talent occulte qu'il faudra exploiter. Son travail, s'il n'est pas irréprochable, demeure inspiré. Remarquez qu'il éclaire un côté du visage de Midnite, un personnage neutre, avec du rouge et l'autre avec du bleu, une technique assez peu subtile et pas très innovatrice.
Les effets-visuels ne sont pas exceptionnels mais ils sont efficaces, ils permettent au récit de mieux se développer. Ils sont souvent perceptibles, malheureusement, mais demeurent partie intégrante de l'aventure Constantine.
Les quelques clins-d'œil à la cigarette et au cancer du poumon de Constantine sonnent comme de la propagande anti-fumeur, mais font sourire, et c'est tout ce qu'on leur demande.
La scène finale est sans équivoque le rédempteur de l'ensemble, de par sa pertinence visuelle et de sa justesse dans l'interprétation. Peter Stormare, en Lucifer, brûle l'écran : sa prestance et sa délicatesse se mélangent pour présenter un vibrant Démon tout habillé de blanc. Dans un face-à–face parfait, bien filmé aussi, avec Keanu Reeves, il corrige le tir, tandis que le film, lentement, sombrait dans le marasme et dans le piège de la redondance.
Pour l'ensemble de Constantine, pas de louanges, seulement une impression de satisfaction éphémère et risquée. Pour Peter Stormare et Keanu Reeves, pour une incursion dans le monde mythique de la religion et pour ce faux-air sérieux, un hochement de tête rassuré, parce que l'expérience apparaît rigoureuse et agréable.
Constantine dégage juste assez de mystère et d'ironie pour plaire, et s'avère un voyage initiatique dans les profondeurs de l'Enfer plutôt intéressant. Ce n'est pas l'ensemble de Constantine qui risque de plaire, mais bien quelques-uns de ses meilleurs éléments.
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