Vu l'importance des émissions culinaires sur les différents réseaux de télévision, de tous ces livres de recettes qui se vendent par milliers, ce n'était qu'une question de temps avant qu'un film (logiquement ce devait être une comédie) s'intéresse à ce milieu fascinant et complexe qu'est le monde de la restauration; dans ce cas-ci, la haute gastronomie, les étoiles, la réputation d'un grand chef... et l'émergence d'un nouveau talent.
Comme un chef, de Daniel Cohen, se propose donc comme cette comédie construite sur la bonne foi, les bons sentiments et les bonnes intentions. C'est par amour pour sa femme enceinte que Jacky accepte un boulot qu'il n'aime pas, comme peintre. Et c'est grâce à ce boulot qu'il rencontre un grand chef désespérément en manque d'inspiration... Qui, au passage, délaisse un peu sa fille sur le point de défendre sa thèse de maîtrise. Disons que les bons sentiments (l'amour, l'importance de la famille, etc.) viennent prendre le dessus sur la cuisine et viennent un peu gâcher la sauce en fin de course.
Car cette émulsion de leçons morales sur l'importance des gens qui nous entourent, sur le carriérisme et sur la simplicité des bonnes choses devient vite redondant (lire : vu dans tellement d'autres films). C'est bien dommage, parce que la première moitié de Comme un chef s'avère être assez réjouissante; on y trouve plusieurs scènes punchées et amusantes et on y découvre un Michaël Youn au fort talent comique. Mais ces saynètes mettent en évidence l'absence complètent d'enjeux vraiment passionnants. On s'amuse, sans savoir pourquoi, on vogue doucement à travers les sourires, puis, les problèmes commencent : il lui a menti, elle le quitte, elle est enceinte, elle accouche, tout le monde est heureux, sois toi-même et etc.
Disons que ce message, absurde au fond, ne prend rien au sérieux. Le réalisme culinaire, d'ailleurs, laisse à désirer; on imagine mal un menu aussi complexe et diversifié être créé en 90 minutes le matin du dévoilement de la nouvelle carte du printemps. Dans la première moitié du film, alors que l'ambiance était plutôt décontractée, plutôt débonnaire, on aurait peut-être même pas remarqué, mais là... Comment réaliser plusieurs complexes manoeuvres de cuisine moléculaire alors qu'on n'a pas d'expérience et pas d'ingrédients? Et le problème, c'est aussi que ce n'était pas nécessaire - du tout - pour une quelconque tension dramatique d'augmenter si maladroitement les enjeux.
Jean Reno est un acteur d'expérience qui est ici sur le pilote automatique. Comme c'est aussi un acteur de talent, ce n'est pas trop désagréable et il demeure compétent, trouvant souvent le bon ton comique. Mais il a l'air de s'ennuyer et au fond, il est possible que nous aussi.
Comme un chef est donc une comédie culinaire, qui - un peu comme tous ces films de hockey qui ne respectent pas le sport - se permet plusieurs raccourcis et retournements douteux. La cuisine, c'est aussi un art, et on ne semble pas respecter le souci du détail requis. Cela donne une comédie générique qui n'a rien de spécifiquement culinaire, ni de spécialement inventif. Cela ne veut pas dire que ce soit mal exécuté, juste que ça ne réinvente rien.