Cherchez Hortense entre dans la catégorie des films étonnants. Au premier coup d'oeil, on sait que nous allons avoir affaire à un film français lent, rempli de lourds dialogues et baigné d'une désespérance ubiquiste, mais Cherchez Hortense est bien plus que ce qu'il laisse présager. Des revirements de situations inattendus et des personnages surprenants (personnifiés par des acteurs en plein contrôle) arrivent à élever l'oeuvre à un rang auquel on ne pouvait s'attendre.
La plus grande force de la production s'avère, sans contredit, la qualité de la construction des personnages. On a l'habitude d'être confronté à des types d'individus très stéréotypés dans les films, mais ici les différents protagonistes sont plus complexes et plus riches que la plupart des bougres qu'on nous expose dans ce genre de long métrage. Un professeur de civilisations asiatiques auprès de chefs d'entreprises, incapable de confronter son père, une metteure en scène au théâtre qui s'éprend de l'acteur principal de sa pièce, une jeune femme d'origine serbe qui tend à régulariser son statut d'immigrée sur le territoire français, un conseiller d'État qui refoule des tendances homosexuelles et un vieux joueur d'échecs suicidaire qui cherche réconfort dans l'amitié et ultimement, dans l'amour, sont quelques-uns des personnages que nous avons la chance de découvrir au fil de l'histoire.
L'histoire aussi est intéressante, quoique peut-être un peu languissante (mais peut-on vraiment échapper à la langueur dans un film français?). On suit les péripéties de ce professeur désemparé avec beaucoup d'intérêt. On s'intéresse à son sort et on en vient à espérer qu'il aboutisse à une fin heureuse. Ce sont des renversements au sein de la narration qui nous séduisent le plus parce qu'ils nous déstabilisent. Nous n'avons pas l'habitude d'être bluffés dans ce genre de production, nous avons généralement une bonne idée d'où la trame nous amène et nous nous trompons rarement, mais Cherchez Hortense nous embobine, et nous ne pouvons cacher notre satisfaction d'être ainsi trompés.
Jean-Pierre Bacri livre une performance poignante, tout comme Kristin Scott Thomas dans le rôle d'une femme d'âge mûr déchirée entre l'amour d'un jeune homme et celui de son mari. Isabelle Carré est également touchante, malgré quelques passages plus robotiques.
Ce qu'on reproche au film sont des choses que l'on reproche à la plupart des oeuvres du même genre; sa mollesse, certains passages plus futiles, des bonds trop grands au sein de la narration, des dialogues moins passionnants que d'autres, mais ce sont des détails qu'on réussit à pardonner. Le film arrive à exploiter énormément de thématiques (l'immigration, l'homosexualité, l'adultère, le rôle du parent, l'attirance, le monde des affaires, la dépression, l'honnêteté). Cette abondance, lucrative au départ, devient rapidement difficile à gérer pour le spectateur.
Cherchez Hortense est une oeuvre surprenante et charmante. Pas de là à crier au génie, mais suffisamment pour mériter notre attention.