Malgré ses tentatives d'un discours féministe positif et d'un portrait espiègle d'une quête identitaire bienfaitrice, Charlotte a du fun reste banal dans son propos. À certains moments, on a l'impression de se heurter à un American Pie en noir et blanc. Heureusement, certains passages ont plus de substances et comblent notre désir de contenu intelligent.
Parler de la sexualité active d'une jeune femme mineure est certainement délicat, mais le traitement débonnaire et affirmé qu'en fait le film permet d'aborder sans détour ce sujet tabou. Les trois adolescentes dépeintes dans le long métrage sont particulièrement intéressantes à voir évoluer. Les jeunes femmes qui iront voir le film sauront certainement s'identifier à l'une d'entre elles. On apprécie aussi qu'elles n'aient pas le casting attendu. Il est rafraîchissant de voir que la timide du groupe est une grande fille aux fortes épaules et que l'anarchiste soit un petit bout de femme mal engueulée qui ne se laisse pas marcher sur les pieds par personne, surtout pas par les hommes. Charlotte n'a pas non plus le look de la jeune première et on adore ça!
Les trois comédiennes principales livrent de justes et convaincantes performances. Même chose pour les garçons, qui arrivent à charmer autant les nouvelles filles du magasin que les spectatrices. Tous les jeunes acteurs paraissent former un groupe soudé, qu'on peut très bien s'imaginer partager un premier emploi. On ne retrouve aucun adulte dans ce long métrage. Et, bien qu'on se demande à quelques reprises : « mais où sont ses parents? », on est enchanté de découvrir ce monde régenté par la génération Y.
Le noir et blanc permet certainement au film de se distinguer des autres productions à l'affiche, mais nous apparaît rapidement plus comme un boulet qu'un attrait. Malgré les bonnes raisons invoquées par la réalisatrice, on n'arrive pas à saisir la réelle utilité d'une telle esthétique dans une comédie pour adolescents. On applaudit, certes, l'audace d'un tel procédé, mais on se questionne à savoir si les jeunes (le public cible de ce film) sauront accepter l'ambitieuse proposition de Sophie Lorain. Il faut dire que la cinéaste a fait un travail exceptionnel de mise en scène. Sa réalisation fluide et égayante fait la vraie couleur du film.
Charlotte a du fun est une oeuvre audacieuse à plusieurs égards, mais manque pourtant d'originalité à d'autres niveaux. Son thème est culotté (la sexualité des adolescentes), mais son scénario manque de piquant. Reste que la comédie mérite qu'on s'y attarde, si ce n'est que pour se rappeler de la candeur qu'on avait à une autre époque de nos vies.