L'auberge espagnole a marqué toute une génération avec son multiculturalisme enrichissant et sa désinvolture réconfortante, puis sa suite Les poupées russes, composé sur le même ton, dans le même esprit, avait aussi rejoint ces jeunes globetrotteurs curieux d'en connaître davantage sur chacune des cultures de ces habitants du monde. Onze ans après L'auberge espagnole et neuf ans après Les poupées russes, on retrouve Xavier et quelques-uns de ses amis, alors que le protagoniste vient de divorcer d'avec Wendy (l'Anglaise rencontrée en Espagne) et doit la suivre à New York pour continuer de voir ses deux enfants.
Casse-tête chinois possède la même irrévérence que ses deux prédécesseurs, mais peut-être pas la même audace. Le film, à nouveau réalisé par Cédric Klapisch, est plus carré, plus conventionnel que l'étaient les deux autres, mais sa verve et sa fraîcheur sont toujours bien vivantes. La réserve dont fait preuve Casse-tête chinois peut aussi peut-être s'expliquer par l'âge des personnages. La jeunesse les a quittés et même si leur vie est toujours un bordel (un casse-tête), ils sont maintenant parents et professionnels et doivent être plus responsables, plus carrés qu'ils ne l'étaient à 20 et 30 ans.
Il y a quand même dans le troisième chapitre des aventures de Xavier quelques passages ludiques qui caractérisent l'univers de Klapisch. Alors que dans le premier film, le protagoniste hallucine Erasmus, dans le plus récent, c'est un philosophe allemand qui débarque dans sa chambre. Le réalisateur ose également quelques passages d'animation et des ludiques clins d'oeil amusants (comme les filles qui s'animent dans la revue porno ou Xavier qui apparaît déguisé en noble du 18e siècle à un Américain, nouveau copain de son ex-femme). Comme dans les chapitres précédents, la narration est encore très présente. Les monologues de Xavier sont toujours bien affutés et parviennent à faire réfléchir sur notre propre vie et sur la direction que prend cette dernière.
Cédric Klapisch avait définitivement, avec Casse-tête chinois, l'intention de boucler la boucle, et donc, de conclure cette histoire, aimée par des millions de cinéphiles, de belle façon, honnêtement. C'est peut-être pourquoi la finale nous apparaît si insipide. Le personnage prend le temps de préciser que ladite conclusion est effectivement monotone, mais le fait que le scénariste est conscient de la pâleur de sa clôture ne l'excuse pas. Peut-être que ça nous permet d'être plus indulgents, mais la tiédeur persiste.
Romain Duris, Audrey Tautou, Cécile de France et Kelly Reilly forment un quatuor électrisant. Chacun apporte de sa couleur à la production et en fait une oeuvre légère qui prouve que le temps ne change pas les gens. Casse-tête chinois, même s'il ne possède pas le même caractère que L'auberge espagnole et Les poupées russes, saura très certainement vous charmer comme il a conquis plus d'un million de Français en décembre dernier.