Cabotins souffre d'un problème grandement présent dans le cinéma québécois : la surdramatisation. Le sujet principal du film (la polémique entourant le théâtre de variété dans les années 80, pourtant d'une richesse et d'une originalité considérables), ne semblait pas suffisant pour les auteurs et producteurs du long métrage, qui ont cru bon ajouter des dilemmes familiaux, des problèmes financiers ainsi que des troubles moraux de toutes sortes à une oeuvre qui aurait dû s'en tenir aux plaisirs ludiques et à l'impertinence de brimer le divertissement, de faire du spectable burlesque une affaire « populaire ».
On accumule les blagues de pets, de homosexualité, d'adultère et d'alcoolisme sans que l'on ressente leur véritable implication dans l'histoire; alors qu'elles devraient être, vraisemblablement, le véhicule d'une réflexion quelconque, d'un approfondissement sur le type de théâtre défendu dans le film. La narration semble n'avoir pour but unique que de dépeindre l'existence misérable de personnages colorés (à la limite souvent de l'invraisemblance) et leur parcours laborieux vers la miséricorde. Une comédie de situation qui ne cesse de fléchir vers le drame et l'apitoiement, c'est rapidement assommant.
En 1985, Marcel, ancien comédien et producteur de théâtre, souffre de problèmes financiers importants et s'ennuie particulièrement de la scène. Il décide donc de réunir tous ses anciens partenaires et de monter, avec eux, un nouveau spectacle de variétés. Les vieux alliés de Marcel n'ont qu'une condition : son fils Pedro, avec qui il a une relation particulièrement difficile, doit également faire partie de la production. Après quelques protestations, l'homme de 60 ans accepte finalement de partager la scène avec son fils pour convaincre les autres de participer à son projet. Marcel comprendra rapidement qu'aussi tendue soit sa relation avec Pedro, elle n'est rien comparée aux immenses complications qu'entraînera la réouverture de son théâtre, La grange à Marcel.
Bien que des comédiens de talent forment la distribution du long métrage - Rémy Girard, Yves Jacques, Dorothée Berryman et Pierre-François Legendre -, leur performance ne parvient malheureusement pas à sauver la comédie, qui flirte bien trop souvent avec le mélodrame. Il aurait peut-être fallu que l'on s'assume davantage dans un style en particulier - tant au niveau du jeu que de la réalisation, qui somme toute s'avèrent assez monotones - pour permettre au scénario de gagner une quelconque sympathie (notamment des jeunes, puisque ce type d'humour clownesque convient mieux aux aînés) et de soulever un réel intérêt.
Malgré l'immense potentiel de l'histoire - cette époque, pas si lointaine, où Gilles Latulippe a dû fermer son Théâtre des variétés à cause de trop de vulgarités -, les dialogues que s'échangent les protagonistes restent, malgré tout, vides et anonymes. Les scènes dans lesquelles le personnage de Rémy Girard, un vieux comédien de l'époque glorieuse du théâtre de variétés, confronte celui qu'incarne Marie-Ève Milot, une jeune étudiante de l'École nationale de théâtre, sont particulièrement intéressantes puisqu'elles reflètent efficacement cette attitude bourgeoise que certains avaient envers la comédie burlesque. Par opposition aux autres personnages (futiles) qui ne sont souvent qu'un prétexte à la rigolade; on n'a qu'à penser à l'homosexualité risiblement dévoilée de Gaston Lepage ou aux mimiques et expressions futiles qu'emploie allégrement Louis Morissette.
Cabotins s'ajoute malencontreusement à cette longue liste de films québécois qui, malgré leurs bonnes intentions et leur riche thématique, ne sauront durer dans l'imaginaire collectif, ayant choisi la voie de la surdramatisation plutôt que celle, toute simple, du divertissement (pourtant si éloquent dans le thème même du film).