Bon nombre de cinéphiles tremblaient à l'idée de revisiter It. Encore plus depuis que son créateur Stephen King a déclaré avoir beaucoup aimé cette adaptation cinématographique. Lui qui avait adoré le médiocre Dark Tower et qui avait détesté le grandiose Shining de Stanley Kubrick...
Ressusciter ce livre culte après le téléfilm édulcoré de 1990 n'était qu'une question de temps. De toute façon, on parle ici de transposition. Ce ne sera jamais la même chose que le roman culte et c'est tant mieux. Le médium est différent, ce qui oblige ses scénaristes à faire des choix. C'est à partir de là qu'il faut les juger sur leur travail. Celui de Cary Fukunaga (qui était pressenti pour réaliser), Chase Palmer et Gary Dauberman (l'auteur des deux Annabelle) s'avère plutôt de bon goût.
Surtout lorsqu'il se concentre sur leurs jeunes héros qui sont interprétés par de convaincants acteurs. Autour du protagoniste (Jaeden Lieberher, l'incroyable garçon de Midnight Special) se trouvent des adolescents qui devront affronter leurs démons afin d'accéder à l'âge adulte. Tout le film est centré sur leurs peurs : celle des parents, d'intimidateurs, des premières menstruations, bref du monde extérieur. Cela devient encore plus probant face aux mystérieuses disparitions d'enfants et à ces fréquentes hallucinations. Le ton, juste, évoque Stand by Me ou Super 8, alors que leur complicité et l'humour qui en émane rappellent les Goonies.
Habilement situé à la fin des années 80 et bénéficiant de la riche photographie du fidèle collaborateur de Park Chan-wook, le long métrage convainc moins lorsqu'il verse dans l'horreur. Pas que les situations ne soient pas effrayantes, bien au contraire. Il y a suffisamment de frissons pour se tenir réveillé tard la nuit. C'est seulement que la construction de ces séquences d'épouvante de la part du cinéaste Andrés Muschietti (le metteur en scène du satisfaisant Mama, qui devait beaucoup à Guillermo del Toro) se répète allègrement, perdant de leur mordant après 2h15. Au début, on tremble et on sourit devant les effets spéciaux très vieille école. Sauf qu'on s'habitue rapidement à tous ces sursauts gratuits et l'ensemble finit par s'enliser dans le grotesque, le prévisible et la facilité.
Impossible toutefois de ne pas avoir la chair de poule et même de dindon devant le clown malsain Pennywise (Grippe-Sou en français). Son interprète Bill Skarsgard est à Tim Curry de la précédente version ce que Heath Ledger était à Jack Nicholson lorsqu'il incarnait le Joker : un personnage inquiétant et traumatisant, qui risque de hanter les cauchemars des petits et des grands. Curieuse idée toutefois de le montrer aussi souvent à l'écran. Plus on le voit et plus son mystère se volatilise. Se concentrer sur le ballon rouge - clin d'oeil sublime au classique d'Albert Lamorisse - aurait été amplement suffisant.
Terrifiant, amusant et même émouvant, It manque de peu d'être un film pleinement satisfaisant tant il utilise sans cesse les mêmes ficelles pour procurer une bonne frousse. On ressortira de la projection avec le sentiment qu'il est encore possible de s'inspirer correctement des écrits de Stephen King et que la suite de ce diptyque s'annonce prometteuse. Il faut seulement accepter cette finale kitch, une des plus ridicules depuis le Sphere de Barry Levinson, sur les bienfaits du travail d'équipe...