Cela faisait déjà un moment que nous n'avions pas eu au Québec un film grand public qui fait autant de bien. On ressort irrémédiablement de la salle de Ça sent la coupe avec le sourire aux lèvres et la joie au coeur. Arriver à communiquer ce sentiment de plénitude au cinéma n'est pas chose simple, mais l'équipe de Ça sent la coupe - du scénariste jusqu'aux acteurs, en passant par le réalisateur - a réussi un coup de maître en insufflant une telle tendresse à son film.
Ça sent la coupe n'est pourtant pas si léger dans son propos. Le film raconte une peine d'amour et la remise en question d'un trentenaire à une intersection importante de sa vie. Ce n'est pas parce que la production a choisi un humoriste dans le rôle principal qu'il s'agit d'une comédie pour autant. Le défi de ce film était justement d'arriver au bon mélange entre humour et drame. On peut dire, sans aucun doute, que Matthieu Simard, l'auteur du roman original et scénariste, ainsi que Patrice Sauvé, le réalisateur, ont réussi leur recette puisque la comédie dramatique emploie un ton juste, constant et cohérent jusqu'à la fin.
Louis-José Houde contribue aussi à l'équilibre des émotions en livrant une performance toute en retenue et en vérité. L'humoriste n'essaie pas d'être drôle, il se contente d'être vrai, une chose que le public ressent dès les premières minutes et apprécie. Émilie Bibeau est également fort convaincante dans le rôle de la conjointe du personnage de Houde et Julianne Côté est à peine reconnaissable tellement elle ne fait qu'un avec son personnage, soit la soeur du héros, mannequin pour le magazine Summum.
Comme pour le livre éponyme, le film est séparé par matchs, du début de la saison des Canadiens jusqu'à la fin, en séries éliminatoires. Cet élément en est un très intéressant et original. Plutôt qu'une temporalité traditionnelle, on vit, avec les personnages, au rythme des parties, ce qui apporte une cadence particulière au récit et caractérise élégamment la production.
L'humour n'est pas complètement absent de Ça sent la coupe (il y a d'ailleurs un gag hilarant et surprenant qui nous fait exploser de rire au milieu du film), mais le drame l'emporte souvent sur la comédie. Peut-être qu'on aurait aimé deux ou trois blagues supplémentaires, mais peut-être aussi que celles-ci auraient brisé ce fragile équilibre si durement bâti... On apprécie donc que l'équipe se soit finalement abstenue.
Ça sent la coupe est un film léger, émouvant, réconfortant et presque patriotique en raison de ses nombreuses références culturelles symboliques (à commencer par la souveraineté de notre sport national : le hockey). La comédie dramatique de Patrice Sauvé est la ouate dans une cinématographie québécoise plutôt hermétique et souvent laborieuse. Merci pour ce parfait petit moment de bonheur douillet!