Bradley Cooper livre une performance exceptionnelle dans Burnt. Il nous amène à nous attacher à ce personnage de chef émérite qui engendre sa propre infamie. Le film peut remercier Cooper d'être aussi captivant puisque, dans les faits, Burnt n'a rien à offrir d'aussi délectable que l'interprétation rutilante de son comédien principal. Ses textes sont fades, sa réalisation aussi, et la manière dont on a romancé cette histoire jusqu'à la rendre mièvre et sirupeuse est désolante.
Le fait que le film nous amène à l'intérieur de la cuisine d'un grand restaurant et nous dévoile les bassesses et les impostures dont sont capables les chefs pour obtenir leurs précieuses étoiles Michelin s'avère intéressant, mais sans plus. Le sucre ajouté à cette histoire transparaît malheureusement dans l'assiette (désolée pour les jeux de mots culinaires; ils sont instinctifs). La simplicité et la retenue auraient pourtant été profitables. La réussite de ce genre de drame humain réside généralement dans la pondération. Malheureusement, on a choisi d'ajouter une histoire d'amour latente, des chasseurs de primes, un financier secrètement amoureux de son poulain et une ex-femme fatale.
Le film s'adresse d'abord aux épicuriens qui aiment la bouffe et s'intéressent à l'envers du décor d'un grand restaurant. Les plats présentés dans ce film sont tous alléchants. Burnt donne envie à son public de fréquenter ces institutions hors de prix qui proposent autant un plat qu'une oeuvre d'art. Certains éléments, plus techniques, proposés dans le film passent, par contre, inaperçus et retardent la trame. Les divergences d'opinions entre le vieux routier (Cooper) et la nouvelle chef avant-gardiste n'apportent rien de bien pertinent à l'ensemble. Les vieilles et les nouvelles façons de procéder (on aborde légèrement aussi la cuisine moléculaire) s'opposent probablement couramment dans les cuisines des grands restaurants, mais le sujet n'était ici pas suffisamment bien développé pour qu'on en ressente son utilité.
« Les gens mangent parce qu'ils ont faim.
Je veux faire de la nourriture qui les fait arrêter de manger »
- Adam Jones
La conclusion fleur bleue contribue également au goût légèrement rance du produit fini. Sans faire échouer le protagoniste dans sa mission, le scénariste aurait pu oser une finale moins classique. Reste que le long métrage n'est pas minable, comme certains le prétendent. Bradley Cooper amène le public à s'attacher au personnage principal, malgré son égocentrisme navrant et son obsession de perfection troublante. Il faut dire aussi qu'entendre l'acteur parler français (il y a des moments où on doute, par contre, qu'il s'agisse bien de français) est adorable et charme notre coeur de loi 101.
Burnt manque d'originalité, de caractère et de fantaisie, mais cela ne fait pas de lui un navet. Qu'est-ce qu'il y a juste au-dessus du navet? Peut-on prendre une autre racine comestible pour désigner un film moyen? Un rutabaga? Un panais? Un Chou-rave? Choisissez celui qui vous convient, moi je crois que j'y vais pour le panais...