Emilio Estevez s'attaque à un mythe bien américain, celui de Robert Kennedy, pour examiner la société dans laquelle il vit. Et comme il habite à Los Angeles, il engage plusieurs de ses amis pour jouer dans son film. Sans poser explicitement de diagnostic, pourtant, il pointe au moins du doigt où regarder, et où se trouvent les plus importants symptômes dans les vies de ces 22 personnages. Des personnages qu'il maîtrise bien et auxquels on s'attache instantanément.
Dans Bobby, l'assassinant de Robert Kennedy est un prétexte, ou presque, pour parler politique. Estevez prend plusieurs décisions importantes en ce sens. D'abord celle de ne pas faire de cas avec le tueur, dont les motifs et objectifs demeurent obscurs, puis avec celle de dépeindre toutes une société en vase clos, dans un microcosme où toutes les différences sont représentées : blancs et noirs, jeunes et vieux, riches et pauvres, célèbres et inconnus. Et c'est justement parce que cette représentation n'est pas simpliste et qu'elle suinte l'honnêteté que Bobby fonctionne.
Le 5 juin 1968, les électeurs californiens sont appelés à voter pour le candidat démocrate de leur choix dans la course à l'investiture présidentielle. Le favori pour l'emporter, Robert Kennedy, fait campagne sur des thèmes sociaux et s'affiche contre la guerre du Viet-nâm. Alors que se prépare la fête qui marquera son élection, 22 personnes présentes dans l'Ambassador Hôtel doivent régler leurs problèmes personnels sans soupçonner qu'un drame se prépare.
Dommage qu'ils soient tous incarnés - efficacement, il faut bien le dire - par des célébrités, parce que des visages moins connus auraient rendu l'histoire du personnage plus importante que celle de l'acteur. Reste qu'ils sont tous bien réalistes malgré le peu de temps qu'on a à leur consacrer.
C'est justement parce qu'il choisit de donner si peu d'importance à l'assassinat de Kennedy que toute la scène finale, où le destin s'accomplit, perd beaucoup de son intensité dramatique. Tout ça sous un flot de bonnes paroles du sénateur de l'état de New York, qui livre un discours patriotique inspiré mais imposé, ici, par la ligne éditoriale du réalisateur. Le problème c'est qu'au cinéma, quand on choisit de donner des leçons, il faut faire croire au public que c'est son idée.
En tant qu'examen anthropologique, Bobby a certainement sa part de mérite, et c'est déjà valeureux d'avoir rassemblé autant de différences dans un même lieu sans donner l'impression de faire dans la flagornerie ou de vouloir attirer la sympathie. La caméra mobile d'Estevez donne bien le sentiment qu'on observe le destin s'accomplir, les désirs et les rêves d'individus se réaliser ou se détruire. Malheureusement, quelques-unes des intrigues secondaires deviennent vraiment secondaires, expriment moins bien qu'on le souhaiterait le malaise en question.
Tout de même, on ne s'ennuie pas et on stimule sa curiosité à regarder Bobby avec les yeux du sociologue. Et on pourra peut-être se réconcilier avec la politique, ou au moins croire à nouveau en sa bonne foi.
Emilio Estevez s'attaque à un mythe bien américain, celui de Robert Kennedy, pour examiner la société dans laquelle il vit. Et comme il habite à Los Angeles, il engage plusieurs de ses amis pour jouer dans son film. Sans poser explicitement de diagnostic, pourtant, il pointe au moins du doigt où regarder, et où se trouvent les plus importants symptômes dans les vies de ces 22 personnages. Des personnages qu'il maîtrise bien et auxquels on s'attache instantanément.