Bluff est presque un concours de circonstances. D'abord la rencontre fortuite des deux réalisateurs lors d'une soirée de courts métrages semble une chance inespérée; puis l'incroyable distribution qu'il est impensable, même a posteriori, de pouvoir assembler; auxquels il faut ajouter l'absence de subvention gouvernementale. Avec toute l'arrogance qu'il faut pour faire sa place, Marc-André Lavoie et Simon Olivier Fecteau trouvent leur style, leur flair pour l'humour et le bon ton pour faire un film charmant et frais.
Dans un édifice à logement de Montréal, un ouvrier et le propriétaire de l'endroit font une découverte surprenante alors que l'édifice est destiné à la démolition. Un objet, un membre, on ne sait trop, qui pourrait avoir appartenu à ce couple qui cherche désespérément à avoir un enfant, à ce voleur qui cambriole son propre appartement, à cet autre couple qui cherche une vieille toile égarée ou alors à ce jeune homme qui se prépare pour une entrevue importante, peut-être aussi à ce beau-fils qui rencontre pour la première fois le père de sa nouvelle blonde.
Six histoires entremêlées, non sans certaines brisures de rythme, qui n'ont évidemment pas la même importance ou la même efficacité. Il n'y a pas de véritable enfant pauvre, cependant. Le montage a apparemment bénéficié d'une attention particulière et ajoute à l'effet comique d'un film qui est, malgré ses bonnes intentions, un comédie dans la plus pure tradition; les subventions, ou leur absence, n'y changeant strictement rien. Cependant, la résilience de ses deux maîtres d'oeuvre est visible, leur expérience et leur talent aussi, eux qui enfilent plusieurs chapeaux en plus d'être réalisateurs-scénaristes-monteurs. Leur expérience en court métrages leur permet de présenter un film visuellement très efficace malgré le manque de moyens.
Dommage que la finale déçoive passablement; elle n'a pas l'envergure et l'inventivité qu'on était en droit d'espérer après cette heure et demie de répliques bien lancées et de performances inspirées. Les acteurs sont efficaces, même si on a un peu l'impression qu'on a gaspillé le talent de certains, comme Isabelle Blais, Julie Perreault ou Denis Trudel, sous-utilisés. Les grosses pointures Rémy Girard, Raymond Bouchard et Marc Messier sont évidemment très performants, particulièrement ce dernier qui a un véritable don pour la comédie. Ses scènes avec Nicolas Canuel sont parmis les plus franches et réussies. Celles de Simon Olivier Fecteau, même si elles n'ont pas le même écho, sont aussi très bien travaillées et très près de leur époque.
Le cinéma - québécois tout autant que les autres - ne peut que bénéficier de l'audace de ses créateurs. C'est comme ça que les techniques s'affinent, que de nouvelles idées surgissent et que les spectateurs et leur diversité peuvent être pleinement satisfaits dans leurs différences de goûts. Bluff est un film réussi, bourré de qualités, qui a tout pour plaire à un majorité de cinéphiles, les plus exigeants comme les moins. Il n'est cependant indépendant que visuellement et sur papier. Il a les mêmes préoccupations que la plupart des films commerciaux, et se lance à la conquête des écrans québécois avec la même idée derrière la tête. Et quand il fera de l'argent, il faudra payer les comédiens, les techniciens... Bluff est une belle idée qui ne changera pas grand-chose.
Bluff est presque un concours de circonstances. D'abord la rencontre fortuite des deux réalisateurs lors d'une soirée de courts métrages semble une chance inespérée; puis l'incroyable distribution qu'il est impensable, même a posteriori, de pouvoir assembler; auxquels il faut ajouter l'absence de subvention gouvernementale. Avec toute l'arrogance qu'il faut pour faire sa place, Marc-André Lavoie et Simon Olivier Fecteau trouvent leur style, leur flair pour l'humour et le bon ton pour faire un film charmant et frais.