En 2020, le problème avec les films de superhéros, c'est qu'ils souffrent irrémédiablement de comparaison. On oppose instinctivement les oeuvres de DC Comics à celles de Marvel, même si les invétérés vous diront que ce sont deux univers COMPLÈTEMENT différents. Au risque de se répéter, on ne peut que constater ici que Marvel rejoint un plus large public que DC, qui se cantonne dans un style beaucoup plus niché.
Avec Birds of Prey, on s'attendait à cette esthétique cartoonesque qui commence avec un dessin animé et se conclut dans un parc d'attractions abandonné, mais on espérait plus de caractère, de culot et d'engagement. On aurait aimé que l'émancipation que vit la protagoniste se reflète davantage dans son film qui, tout compte fait, reste assez sage vu l'aliénation de son héroïne. La forme s'avère, malgré tout, plutôt audacieuse. Vu le narcissisme d'Harley Quinn, les scénaristes ont décidé de lui permettre de contrôler la trame narrative de sa propre histoire. Ainsi, grâce à la voix hors champ, elle raconte ses aventures et choisit ce qu'elle veut nous dire et quand elle veut nous le dire. Le public se promène donc dans le temps, avançant et reculant au gré des délires psychotiques de la protagoniste.
« Sacré nom d'une porte arrière petit castor, ça dégénère. »
Bien que les scènes de combat ne sont pas comparables aux prouesses faites par Marvel dans les dernières années, Cathy Yan livre quelques superbes séquences, dont cette magnifique attaque dans le poste de police avec des fumigènes colorés et des confettis. L'échauffourée meurtrière qui suit dans la prison sous l'eau des gicleurs s'avère aussi plutôt mémorable. Il faut également saluer le tour de force de la direction artistique, qui a livré des décors, des costumes et des accessoires à la hauteur de l'excentricité démesurée du personnage.
Margot Robbie incarne une Harley Quinn parfaitement convaincante. Même si elle pose des gestes révoltants, on s'attache à cette écervelée qui assomme ses victimes avec un maillet et les poursuit en patins à roulettes. Ewan McGregor n'est pas mal non plus sous les traits de Roman Sionis, alias Black Mask. Il est tout aussi dément que la protagoniste, ce qui nous donne droit à des scènes farfelues, où la violence est tellement graphique qu'elle devient comique. D'ailleurs, on aurait aimé que Birds of Prey insiste sur cet humour noir qui apporte une dimension psychopathique à l'ensemble. On aurait aimé rire autant que dans Deadpool, mais Birds of Prey n'a malheureusement pas ce qu'il faut pour compétitionner avec l'antihéros de Ryan Reynolds.
En somme, on passe un moment agréable avec Harley Quinn; on est invariablement diverti pendant presque deux heures. Reste qu'on ne peut s'empêcher de se dire que ça aurait pu être encore mieux, que ce personnage (et ses soeurs du crime) avait plus à donner... Voyons voir si la prochaine fois, elle attaquera avec plus de toupet.