On ne peut évidemment faire une critique d'un thriller érotique en passant sous silence les scènes «torrides» (les guillemets sont intentionnels). En effet, malgré une bande-annonce plutôt prometteuse, Babygirl déçoit en partie, notamment par des choix musicaux clichés qui brisent l'ambiance des scènes plus intimes. Alors que ces moments pourraient (peut-être?) devenir plus excitants après de (trop) longs préliminaires, l'ambiance est soudainement brisée par «Never Tear Us Apart» de INXS ou pire, «Father Figure» de George Michael. Pourtant, ce dernier titre est bien choisi. En effet, si vous pensiez voir un film sur les conquêtes d'une cougar digne de ce nom, vous serez déçus. Il s'agit ici plutôt d'une pauvre femme victime de ses «Daddy Issues'. Mais c'est là toute la complexité du personnage joué par Nicole Kidman.
Elle incarne Romy, une PDG très influente, qui entame malgré les risques et les préjugés une liaison avec un stagiaire beaucoup plus jeune (Harris Dickinson). L'actrice, qui porte évidemment l'entièreté du film sur ses épaules (et sur tout son corps dénudé), réussit à nous convaincre de la crise existentielle de Romy, de sa soif de pouvoir, de son mal-être, de ses traumatismes et de ses peurs, mais semble souvent emprunter un peu de tout à ses précédents rôles plus marquants. Impossible de ne pas revoir la femme rangée qui fantasme sur un autre homme que son mari dans Eyes Wide Shut (1999).
Alors que les membres de l'Academy ont su démontrer au cours des dernières années que se mettre à nu est payant pour les actrices, fort à parier que Nicole Kidman sera en lice pour sa sixième nomination aux prochains Oscars. Peut-être y aurait-il aussi une mention pour Harris Dickinson, qui parvient à maintenir le mystère - et surtout l'arrogance - de son personnage jusqu'à la fin.
On ne pourra certainement pas en dire autant d'Antonio Banderas qui offre une performance désolante, particulièrement lors d'une intense scène qui devrait être «la sienne', vers la fin du film...
Mais revenons aux scènes à caractère sadomasochiste. Si elles peuvent parfois rendre le spectateur inconfortable, c'est assurément grâce au talent et à la sensibilité de la réalisatrice Halina Reijn. Cette dernière parvient à saisir toute l'intensité et l'authenticité d'une sexualité entre deux adultes consentants. Une vision féminine qui fait assurément toute la différence, notamment au niveau de la direction des acteurs.
C'est également Halina Reijn qui signe le scénario qui n'est pas ennuyant, mais tout de même prévisible. Dommage, les quelques revirements auxquels nous avons droit vers la fin du film ne sont surprenants qu'à cause de leur absurdité. Une trame plus intéressante (l'ambition de l'adjointe de Romy) aurait pu être plus (et mieux) exploitée.
Le film offre, malgré ses faiblesses, une réflexion intéressante et très actuelle sur le désir féminin, les jeux de pouvoir et les rapports entre les différents sexes et les différentes générations. À voir en gardant vos attentes mesurées...