C'est plutôt rare que Ken Scott ait raté sa cible avec ses comédies. Le film La grande séduction, dont il était le scénariste, est devenu un classique du répertoire québécois, Les doigts croches avait été reçu de façon élogieuse auprès de la critique puis Starbuck a connu un rayonnement impressionnant dans le monde entier, dont chez nos voisins américains, qui en ont fait une adaptation avec Vince Vaughn. Cette fois, avec Au revoir le bonheur, le réalisateur et scénariste nous replonge dans cette ambiance rurale chaleureuse qui nous avait tant charmés à l'époque de La grande séduction.
Le cinéaste nous présente les Îles-de-la-Madeleine comme un endroit hors du temps, exotique, aussi pittoresque que la Provence, là où le film devait d'abord être tourné (avant que la pandémie change les plans). Cette séquence lors de laquelle le personnage de François Arnaud visite l'archipel du golfe du Saint-Laurent avec ses enfants et son amoureuse dans un montage exaltant s'avère, à elle seule, une carte de visite incomparable pour ce splendide coin de pays.
Au revoir le bonheur raconte l'histoire de quatre frères très différents qui se rassemblent pour une ultime fois dans la maison familiale des Îles-de-la-Madeleine afin de rendre un dernier hommage à leur père décédé. Louis Morissette incarne le Businessman, François Arnaud est l'Épicurien, Antoine Bertrand personnifie le Nostalgique et Patrice Robitaille interprète l'Auteur. Chaque comédien interprète un personnage loin de ceux qu'on a pu les voir jouer par le passé. Morissette est plus rigide qu'on ne l'a jamais vu, Arnaud, de son côté, est plus désinvolte, Antoine Bertrand doute constamment alors que Robitaille lâche son traditionnel rôle du macho au-dessus de ses affaires pour personnifier l'artiste torturé. Julie Le Breton campe, elle aussi, un rôle dans lequel on l'a peu vue.
Ken Scott possède une plume unique qui fait la réussite de ses films. Encore une fois ici, le ton juste et nuancé fait toute la différence. Une comédie dramatique qui nous fait à la fois rire et pleurer n'est pas aisée à obtenir, mais Au revoir le bonheur réussi tout cela, et même plus. Le film renferme une grâce qui nous apporte un doux réconfort. La musique, composée par Nicolas Errèra, accentue ce sentiment de bien-être.
Juste autant dans sa réalisation, ses textes que ses interprétations, Au revoir le bonheur saura épater et charmer quiconque s'y frottera. Du bonheur, garanti.