On ne s'étonnera pas que comme premier long métrage en action réelle, le réalisateur Sylvain Chomet mette en scène une histoire teintée de musique et de nostalgie où des personnages, accablés par des événements du passé, ne savent pas comment vivre leur vie au présent. Certes, Attila Marcel est foisonnant de références visuelles et luxuriantes de créativité, tellement qu'il tient parfois du bricolage, et sans dire qu'il est résolument passéiste, il est évident qu'il semble regretter le charme suranné des choses telles qu'elles existaient avant. Il dégage aussi de ce film une grande humilité face à ces « maîtres » d'autrefois, et le long métrage les évoque délicatement, sans les reformater toutefois comme le feraient les cinéastes postmodernes. Le résultat est forcément inégal...
Après Les triplettes de Belleville et L'illusionniste (qui était un ennuyant hommage à Jacques Tati) Sylvain Chomet propose une comédie douce-amère mettant en vedette un personnage central muet, marqué par une image d'enfance (là c'est moi qui réfère à Chris Marker, mais il reste que c'est ce dont il s'agit), qui fait en quelque sorte un voyage dans ses souvenirs grâce aux substances hallucinogènes cultivées par une voisine, Madame Proust (!), pour retrouver sa mère morte tragiquement. Le cinéaste français fait de ce film une mécanique bien huilée, de toute évidence rigoureusement contrôlée, qui est suffisamment bien menée malgré les enjeux assez faibles qui apparaissent au cours du récit (des choupettes?).
Sans être véritablement mauvais, les interprètes ne trouvent jamais le bon ton et semblent tous jouer dans des films différents; tante Anna et tante Annie (Bernadette Lafont et Hélène Vincent) dans une comédie de situation, Anne Le Ny, dans une oeuvre de psycho-pop et Guillaume Gouix, à cause d'un jeu nécessairement plus burlesque, dans une comédie à la Chaplin ou Keaton. Et les scènes chantées, assez joliment écrites, évoquent Demy. Dans tous les cas, cependant, et surtout pour les personnages secondaires, on est à deux doigts du cabotinage.
En action réelle ne veut pas dire « réaliste », semble s'obstiner Chomet, et les couleurs, les costumes et les décors sont entre génie et kitsch. Les « voyages temporels mentaux » du personnage baignent dans une lumière orangée factice et le dispositif de la caméra (en vision subjective) apparaît bientôt lourd, figé.
Tout suinte la nostalgie et l'hommage dans Attila Marcel. Le résultat est assez joli, au fond, et pas exactement raté quoique pas réussi non plus. Reste que Sylvain Chomet a sans doute beaucoup plus à dire et à faire vivre en frais d'émotions que ce qui ressort de ce film, très mineur, qu'il faut voir comme un « premier » film, avec les maladresses que cela sous-entend. Reste à voir si l'auteur saura canaliser ses forces.