Suspense politique de haute-voltige, Argo est avant tout un long métrage de très grande qualité. Techniquement parfait, scénaristiquement mature, bien interprété et bien réalisé, voilà un film passionnant qui fonctionne à merveille à tous les niveaux, ce qui permet de maintenir une tension constante du début à la fin. Un véritable exemple de travail bien fait... même si on sent à quelques reprises la manipulation. C'est de bonne guerre, j'imagine, dans un film qui en parle justement...
On ne triche pas cependant sur les moyens de créer cette tension, qui mise avant tout sur la crédibilité du scénario plutôt que sur une quelconque accumulation d'effets de style ou de revirements ridicules. Argo a un cadre historique à respecter (cela ne veut pas dire à la lettre...) et s'en accommode parfaitement. La preuve? Même si on sait comment ça se termine, on est sans cesse en attente du prochain moment fort.
Après une habile - mais simplifiée - mise en situation, le film entre immédiatement dans l'action. L'attaque, par un groupe terroriste, de l'ambassade américaine à Téhéran, est filmée et montée avec une redoutable efficacité, et on est immédiatement intégré au film. Par la suite, les détails de la reconstitution historique sont crédibles et convaincants, et il ne faut pas longtemps pour qu'on soit entièrement dédié au récit et aux personnages.
Tous les comédiens sans exception sont particulièrement efficaces. Si la plupart n'ont pas à démontrer beaucoup de finesse dans leur jeu (n'étant présents à l'écran que quelques secondes à la fois), ils contribuent tous à la création quasi-magique de toute cette tension qui ne s'essouffle pas. Le fait qu'ils soient pratiquement tous des acteurs peu connus contribue également au réalisme.
On sent la manipulation lors de la finale, qui est dans la plus pure tradition hollywoodienne, alors que la réussite de la mission se joue sur une fraction de secondes (deux fois, même trois fois). Déjà que les prémisses de l'histoire sont même trop surréalistes pour être vraies - la CIA tente de faire libérer des otages américains réfugiés chez l'ambassadeur canadien à Téhéran en inventant un faux tournage de film de science-fiction - voilà que c'est la chance (heureusement que le montage existe), plutôt qu'une bonne préparation, qui sauve la vie des personnages, ce qui nous a toujours paru moins fort que le contraire.
Et si on n'irait pas jusqu'à croire que les événements réels se sont exactement déroulés comme dans le film (ce n'est, de toute façon, pas très important), on peut quand même ressentir ce grand respect pour les héros obscurs que propose en fin de compte le long métrage. Le cadre hollywoodien de ce film, autant la présence de Ben Affleck que le contexte de la production du film dans le film, rappellent par opposition que de nombreux gestes héroïques sont posés sans espérer de reconnaissance publique. C'est quand même rassurant, vous ne trouvez pas?