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Totally drunk!
Thomas Vinterberg est un cinéaste qui avait démarré sur les chapeaux de roues avec le chef-d’œuvre « Festen ». Un film qui devint l’une des œuvres tutélaires du Dogme 95 (règles de tournage extrêmes prônant la véracité et l’ascétisme cinématographique les plus totaux) que le cinéaste a initié avec, entre autres, le polémique Lars Von Trier. Tout cela date de plus de deux décennies et, depuis, le metteur en scène s’est assagi avec une carrière en dents de scie et peu d’œuvres mémorables. On retiendra notamment son second coup d’éclat, l’immense « La Chasse », déjà avec Mads Mikkelsen qui avait reçu le prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes 2012 pour ce film. Il semblerait que leur association soit de bon aloi tant elle est qualitativement fructueuse. En effet, « Drunk » est une réussite presque du même acabit et Mikkelsen y montre encore une fois toute l’étendue de son talent et de sa palette de jeu. Il est tout simplement monstrueux et impeccable passant naturellement de l’homme effacé à la folie et la joie de l’ivresse avec une fluidité remarquable. Jusqu’à un bouquet final en musique où l’acteur nous scie en deux. Le Festival aurait eu lieu cette année et à la lumière des films sélectionnés, il fait peu de doutes que le comédien aurait pu rafler un second prix d’interprétation. Et ce film de se placer comme l’un des meilleurs de la sélection dans ceux qu’on a pu découvrir aux côtés de « Été 85 ». Pourtant, à la lecture du script, on peut être dubitatif devant ces quatre amis qui décident de tester une thèse fumeuse sur les effets de l’alcool. On se croirait devant le script d’une comédie américaine régressive, mais le résultat est tout autre : profond, beau et délicat.
Si le film développe quelques longueurs par-ci par-là et n’accorde pas la même importance en temps et en développement aux quatre personnages (celui de Mikkelsen est central donc c’est compréhensible qu’il soit plus présent mais ne pas mettre les autres au même niveau narratif entraîne un léger déséquilibre pas forcément justifié), ce sont de menus défauts peu préjudiciables. En revanche, on aurait aimé que le côté amoral et transgressif d’un tel sujet soit maintenu jusqu’au bout. En effet, le film développe bien les bons côtés de la biture et des moments sous effets éthyliques jusqu’à son final joyeux et dansant prônant l’hédonisme sous certaines limites. Mais, et on ne peut le lui reprocher, Vinterberg accorde aussi une dernière partie aux limites de cette expérience avec les effets néfastes (et attendus) de l’alcool. Cette dernière demi-heure plus consensuelle semblait évidente mais on aurait intimement préféré que le film soit politiquement incorrect et vraiment transgressif du début à la fin. Qu’il ne garde dans son script que les bons aspects de l’ivresse, que ce « Drunk » soit une ode à celle-ci en quelque sorte. Sans être pourtant moralisateur, le long-métrage finit donc par rentrer dans le rang, tout comme dans l’intimité et les fêlures de ces protagonistes pour y installer les retombées négatives de cette expérience. C’est finement observé et juste mais ce ne sont pas les meilleurs moments du film. Néanmoins, cela reste une élégie puissante envers la vie avec un grand V à consommer sans modération et filmée avec chic et soin par un cinéaste qui capitalise sur la lumière des belles et longues journées d’été danoises.
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