Quelle est la série de films la plus insignifiante des dernières années, étant tellement mauvaise qu'elle en devient presque fascinante? Certainement les adaptations (ou inspirations, selon les fans littéraires) des livres After d'Anna Todd, qui se voit gratifier d'un troisième épisode cinématographique.
After We Fell débute là où son prédécesseur se terminait... même s'il pourrait se dérouler n'importe quand tant les situations se suivent et se ressemblent. Après avoir rompu et s'être pardonné des milliers de fois déjà, Tessa (Josephine Langford) et Hardin (Hero Fiennes Tiffin) sont de retour ensemble. Mais un rien peut entraver leur bonheur, que ce soit une accolade du garçon à une ancienne amie, un regard prononcé de son amoureuse pour un serveur, la voix d'une autre femme au téléphone, le retour dans le portrait d'un papa alcoolique, des secrets, des mensonges, le désir de faire passer la carrière avant tout, etc. etc. De quoi se séparer encore des centaines de fois pour mieux se retrouver avant la fin, où émane évidemment une révélation aussi farfelue que prévisible.
Rien de nouveau sous le soleil? Oui et non. Il ne s'y passe absolument rien (on dirait parfois un long feuilleton télévisé), les dialogues sont toujours aussi insipides et la mise en scène de Castille Landon s'avère particulièrement soporifique. Sauf qu'on sent un désir dans le scénario de Sharon Soboli d'être pris au sérieux. L'auteure cite The Great Gatsby et Jane Austen, avant de rater sa psychanalyse familiale afin d'expliquer les échecs et hésitations de ses héros qui sont défendus par des acteurs au charisme et au talent limités.
Ce n'est pas tant la faute de Josephine Langford qui pourrait s'en sauver dans un autre contexte. Mais tous les comédiens qui l'entourent, des rôles principaux aux plus secondaires, alternent entre le mauvais et le misérable. Déjà que plusieurs personnages récurrents sont incarnés par des interprètes différents (ce n'est malheureusement pas le cas du piètre Hero Fiennes Tiffin qui n'en finit plus de signer Robert Pattinson), on finit par remarquer presque par hasard la présence de Mira Sorvino, qui avait déjà remporté un Oscar dans une autre vie et qui boit la tasse autant que ses collègues.
À l'origine, l'intérêt très relatif de la licence était de proposer une variation adolescente de Fifty Shades of Grey. Sauf que le résultat n'a jamais autant laissé perplexe que cette fois-ci. Sur le plan lubrique et sexuel, l'enjeu est d'explorer des tabous éculés (ton père est à côté, on peut se faire surprendre, regarde les beaux miroirs) sans s'émoustiller une seule fois, au détour de chansons interchangeables aux paroles trop explicatives ('you're a free animal') et d'un montage rudimentaire et peu subtil où l'acte de copulation est accompagné d'une bouilloire qui libère de la vapeur... Il n'y a rien de très osé là-dedans, mais au moins on insiste sur le port du préservatif. Sauf que là où le bât blesse, c'est sur le plan « psychologique », alors que l'homme manipulateur est le premier à insister pour avoir une relation et c'est lui qui rompt dès la moindre anicroche, faisant languir sa partenaire qui l'accueille évidemment les bras ouverts et le sourire aux lèvres. Comme modèle féminin, on repassera.
La crédibilité n'a jamais rimé avec la série After - à côté de ça, Twilight ressemble à du Shakespeare - et After We Fell le confirme amplement. Sauf qu'en cherchant à être moins ridicule que ses prédécesseurs, cette suite n'en devient que plus consternante. On ne rit plus autant qu'avant, la stupidité de l'entreprise s'étant transformée en une sorte de prétention particulièrement embarrassante qui détruit presque tout le charme risible d'antan. En espérant que cela n'handicapera pas trop le quatrième et ultime volet (avant le traditionnel antépisode, bien entendu) qui a été tourné dans la foulée et qui prendra l'affiche l'année prochaine.