Les films de Ricardo Trogi sont toujours excessivement gratifiants. Il se dégage de sa franchise autobiographique un bonheur simple, nostalgique, qu'on ne peut refouler. 1991 ne fait pas exception. Ce nouveau film est parfaitement bien assorti avec les autres opus de la série (1981, 1987). Néanmoins, on reconnaît ici une certaine maturité qui n'existait pas, ou presque pas, dans les autres volets. Ricardo a maintenant 21 ans et bien qu'il se retrouve empêtré dans une foule de situations gênantes, il s'avère plus sage et réfléchi qu'auparavant. On aime bien ce doux passage de Ricardo vers l'âge adulte.
Toutefois, avant les responsabilités et les obligations du monde des grands, Ricardo se permet de voyager, de voir le monde au-delà de son Québec natal. Le film illustre bien les mésaventures, les découvertes, les rencontres et les mauvaises décisions qui parsèment les voyages de jeunesse. 1991 nous donne envie de retourner à cet âge d'innocence et de partir avec une brosse à dents, un t-shirt et beaucoup de naïveté et d'espoir dans son sac à dos vers l'inconnu d'un pays qu'on a vu, jusque-là, qu'en photos. Bien que le film mise un peu trop sur l'anecdote et manque parfois de rigueur dans son fil conducteur, il renferme un plaisir contagieux qui nous permet de pardonner plus aisément ses quelques défauts.
Évidemment, le film est à nouveau bercé d'un humour moqueur et lucide signé Ricardo Trogi. Une fois de plus, la narration enrichit l'action avec une délicieuse pointe d'ironie. Les situations loufoques dans lesquelles se retrouve Ricardo génèrent, elles aussi, des fous rires contagieux. Sans surprise, les scènes mettant en vedette la mère du protagoniste, jouée par Sandrine Bisson, sont les plus mémorables. L'actrice apporte à son personnage à la fois une troublante intensité et une douceur sans nom. Malgré ses cris hystériques, on arrive à ressentir l'affection qu'elle porte à son garçon, parti explorer le monde. Le fait qu'elle insiste à ce point sur la fameuse pochette de voyage est d’ailleurs hilarant... surtout que pour finir, le pauvre Ricardo aurait donc dû écouter sa mère!
Jean-Carl Boucher s'avère encore fort convaincant sous les traits d'un jeune Ricardo Trogi. Nous nous étions profondément attachés au personnage lors des deux premiers chapitres, et ce n'est pas différent ici. Dès les premières minutes, Boucher nous convainc de l'aimer et de lui pardonner ses décisions douteuses. À noter qu'Alexandre Nachi, qui interprète le bohème Arturo, livre aussi une performance remarquable. Si on ne savait pas qu'il était Québécois, nous le prendrions pour un Européen. Ses accents (le personnage parle plusieurs langues) sont fluides et son attitude débonnaire est fort crédible.
1991, c'est du bonheur du début à la fin. Même qu'on en aurait pris plus! On ne peut nier qu'une certaine déception nous habite lorsqu'on voit défiler le générique de fin. Ricardo a mentionné sur toutes les tribunes que ce film pourrait ne pas être le dernier de la franchise... Espérons que ses idées d'un quatrième film se concrétiseront puisque nous ne sommes pas prêts à dire adieu à ce petit plaisir quadriennal.