Mathieu Roy, le réalisateur du documentaire Surviving Progress, tourne depuis le 29 juillet dans la région de Montréal et dans les Laurentides son premier long métrage de fiction, intitulé L'autre maison. Le film met en vedette Marcel Sabourin dans le rôle d'Henri Bernard, un homme de 86 ans atteint de la malade d'Alzheimer. Ses deux fils, incarnés par Roy Dupuis et Émile Proulx-Cloutier, tentent de s'occuper de lui. Florence Blain, Julie Gayet et Zal Sisshoko font également partie de la distribution.
Mathieu Roy, dont le père est le journaliste Michel Roy et le frère du lecteur de nouvelles Patrice Roy, signe également le scénario du film avec Michael Ramsey. « C'est mon premier long métrage de fiction, à chaque dépôt on l'a retravaillé beaucoup, et on est arrivé à une version de tournage qui nous plaît beaucoup. »
« C'est l'histoire d'un père qui s'enfonce dans la confusion, qui est atteint de la malade d'Alzheimer et qui dépend de son jeune fils, à la maison. Avec sa copine, il s'occupe beaucoup de lui, tandis que le frère aîné, qui est journaliste international, voyage de conflit en conflit. On peut imaginer qu'il fait ça peut-être pour fuir sa vie, pour ne pas affronter la difficulté de voir son père décliner, et la scène qu'on filme aujourd'hui c'est justement son retour. Il revient pour célébrer l'anniversaire du père, et il y a de la tension entre les deux frères parce que Gabriel, interprété par Roy, veut aller visiter un centre pour personnes âgées avec le père, alors que l'autre fils est plutôt opposé. »
Les deux acteurs qui incarnent les frères doivent avoir une forte complicité. « J'ai pensé à Roy rapidement, parce que le personnage vit ses émotions à l'intérieur beaucoup, et Roy est assez extraordinaire pour nous donner une myriade de nuances dans ses regards, dans son intensité, dans son magnétisme. Jusqu'à maintenant je suis soufflé par sa performance; je savais que c'était un grand acteur, mais je le reconfirme à tout le monde. »
« Il est professionnel, il est rigoureux, il questionne chaque intention de chaque réplique, donc quand ma scène n'est pas parfaite, ils me le disent et on la retravaille. C'est très très rassurant d'avoir sur un plateau des acteurs comme Roy et Marcel, qui ont une vaste expérience, pour mon premier film de fiction. »
« Émile, c'est en audition que ça m'a frappé; c'est le personnage, ça ne s'explique pas, il l'avait. Il fallait que ça fitte ensemble, c'est Roy qui a gentiment accepté de venir faire l'audition avec les trois ou quatre comédiens que j'avais retenus pour le jeune frère. On a senti tout de suite que la chimie se créait. »
Est-ce un film autobiographique? « Le contexte de ma vie a servi d'inspiration. Ce qui m'a inspiré, c'est le panache que mon père a su préserver dans le déclin. Malgré les problèmes de mémoire, l'aphasie, la perte des repères, mon père a réussi à garder un français étonnamment éloquent et presque poétique. J'appelle ça la poésie de la confusion; il réussissait à rester très très fier, et très courtois, et éloquent avec les gens. Ça nous touchait tous dans la famille. C'est à ça que je rends hommage. À sa grandeur dans la maladie. »
« Ce n'est pas un film sur sa vie. Ensuite, j'ai décidé décrire sur ce que je connais, sur un personnage qui est un petit peu inspiré de moi, un petit peu inspiré de mon frère, du métier de journaliste, que j'ai fréquenté toute ma vie, mais ce n'est pas mon frère, ce n'est pas moi, ce sont des personnages qui ont trouvé leur propre personnalité. »
Comment raconter cette histoire par le cinéma? « Je fais des films parce que je pense que ça demeure le médium qui rejoint le plus grand nombre et qui, le plus facilement, peut provoquer des catharsis. Les gens peuvent vivre leurs émotions plus facilement qu'au théâtre ou à l'opéra ou en lisant. C'est le métier que j'exerce. »
Le tournage se poursuit jusqu'en septembre. « On a fini tout ce qui était à Montréal, on a tourné de belles scènes avec l'actrice Julie Gayet et Roy, et là on s'installe ici pour trois semaines, on fait toutes les scènes à la maison familiale. Ce sont des scènes plus intimes entre Marcel et Émile, donc entre le père et son jeune fils, et sa copine. On rentre dans l'intimité de la maison, de sa confusion, dans sa vie de tous les jours. Après ça, on fait quelques petits voyages à l'étranger. On tourne à Paris, en Afrique, on tourne des scènes en Alberta pour tricher l'Afghanistan. »
L'autre maison, qui sera distribué par TVA Films, doit prendre l'affiche en 2013. Roger Frappier et Félize Frappier produisent le film sous la bannière Max Films.