Après Saints-Martyrs-des-Damnés et À quelle heure le train pour nulle part, le réalisateur Robin Aubert présente ce vendredi son nouveau long métrage, titré À l'origine d'un cri. Distribué par TVA Films, le long métrage prend l'affiche dans une vingtaine de salles à travers le Québec. Patrick Hivon, Michel Barette et Jean Lapointe incarnent les trois personnages principaux du film, trois hommes de la même famille qui devront confronter leur ressentiment et leur douleur afin de surmonter le deuil qui frappe l'un d'eux.
Pour le réalisateur, l'expérience d'À quelle heure le train pour nulle part n'aura pas changé grand chose à sa manière de travailler. « Je me base toujours sur le film que j'ai à faire, mais ce que l'expérience m'a apporté c'est peut-être une caméra un peu plus au service de l'acteur, plus de caméra-épaule, pour sentir qu'on est avec eux. Contrairement à Saints-Martyrs-des-Damnés, c'est une caméra qui est moins léchée, dans le sens où la caméra ne découpe pas, elle suit. »
« Je vois toujours le film comme une toile où les personnages seraient enfermés. Même si c'est à l'épaule, j'avais l'impression que mes personnages étaient prisonniers. Les figurants sont très importants dans mes films, je les choisis moi-même, je les rencontre, les visages particuliers. Les endroits sont déserts, il y a quelques personnes par-ci, par-là, souvent des vieillards. »
Crois-tu que le fait que tu sois maintenant un réalisateur connu donne aux gens des prédispositions face à ton oeuvre? « Je pense que les journalistes me laissent l'opportunité d'explorer. Quand ils vont voir mon film, ils savent que ça ne sera jamais un film maîtrisé, ils savent que ça va être encore une affaire d'instinct. Je n'aime pas avoir de recul sur mon travail. Le recul, ça va être quand je vais être sur ma chaise berçante, bien vieux, sur ma galerie, mais il va être trop tard. »
« Je n'y crois pas, moi, au chef-d'oeuvre. Dans ce que je fais moi, en tout cas, je n'y crois pas pantoute. Quand je vais faire le film le « plus maîtrisé de cette année », je vais arrêter. Ça ne sera plus l'fun, ça va être trop clean. L'émotion, ce n'est pas personnel, l'émotion ça n'a pas d'âge, c'est pour tout le monde. »
Mais le cinéma, ça reste une question d'instinct, d'impression. « Moi je ne réfléchis pas quand j'écris. Si après tu analyses de façon intellectuelle, tu vas enlever le subconscient, donc une certaine forme de symbolisme que ne tu ne perçois pas. Ce n'est pas réfléchi les symboles. Comme créateur, mon film est tout le temps étranger à moi, parce que j'en comprends la moitié. »
Est-ce que les premières prises sont souvent les plus vraies, justement parce qu'elles sont les plus instinctives? « Ça dépend tout le temps de la scène. En général, les premières prises sont meilleures. Je pense. Le côté instinctif de ne pas trop penser, c'est dans l'écriture, pour le visuel, tout est réfléchi, on passe des heures et des heures en réunion avec le directeur photo, directeur artistique, les costumes, tout ça. »
Le casting est donc primordial. « Je te dirais que, dans ce cas-là, les casting, c'est 90 % du travail. Je ne voyais pas un acteur qui travaillait pour faire un personnage, je voyais vraiment le personnage, et je pense que c'est rare qu'un acteur rencontre un personnage comme dans ce cas-ci. S'il y a une affaire dont je suis fier, c'est ça. »
Un sentiment que partage aussi Patrick Hivon. « Je reconnaissais cette rage-là, alors quand j'ai lu le scénario, j'ai eu une révélation. Mon expérience de vie me rapprochait du personnage. »
« Robin est quelqu'un qui n'est pas complaisant et qui est de bonnes fois, comme son film, comme ses personnages. C'est un gars simple, qui aime le monde. Il ne se considère pas seulement comme un artiste, mais comme un être humain, et c'est ça que je sens dans le film. Il aborde les acteurs avec beaucoup de respect, on se sent aimé de lui. Veux, veux pas, il se met à nu devant nous, et on se met à nu aussi, ça prend beaucoup de courage de faire ça, d'aller puiser dans des souvenirs. Il a été tellement délicat avec ça. Il ne nous demande pas d'être bon, il nous demande d'être vrai. »
On voit rarement des histoires où les hommes refusent les compromis sur leurs émotions. C'est une histoire de gars, ce sont de vrais gars, qui ont de la difficulté à exprimer leurs émotions. « Drôlement, il y a énormément de femmes qui apprécient de voir des gars émotivement chargés comme eux autres. Tu es capable de voir leurs faiblesses, leur fragilité, ils ont besoin de tendresse, mais c'est juste des maladroits. Ça touche les filles au plus haut point. Robin a emmené ce côté fragile-là des gars, c'est ça qui fait la force du film. »
À l'origine d'un cri prend l'affiche ce vendredi.