Chaque semaine, Cinoche.com revisite un film qui a marqué son époque, divisé le public et/ou la critique, ou finalement obtenu le respect et la notoriété qu'il aurait dû avoir dès sa sortie - ou qu'il a perdus depuis -, qu'il s'agisse d'un incontournable, d'un trésor caché ou d'un plaisir coupable. Ce dimanche, nous nous penchons sur le cas de...
WINGS (Les ailes)
William A. Wellman | États-Unis | 1927 | 144 minutes
Il n'y a probablement pas de moment plus approprié que maintenant pour revisiter le drame de guerre Wings de l'Américain William E. Wellman, premier long métrage de l'Histoire à avoir remporté l'Oscar du Meilleur film.
Et la raison est fort simple : Top Gun: Maverick.
La méga production mettant en vedette Tom Cruise a attiré les foules et battu nombre de records tout au long de la saison estivale en capitalisant sur un atout que nous avons de plus en plus tendance à prendre pour acquis : la magie du cinéma. Nous sentions à chaque instant du long métrage de Joseph Kosinski l'entière dévotion comme l'implication physique, émotionnelle et mentale des comédiens et de l'équipe technique.
De bien des façons, Wings, c'est Top Gun à l'époque du muet. Des gros plans sur le visage des pilotes en plein affrontement aux batailles aériennes saisissantes, en passant par les guerres d'ego, mais aussi une illustration sentie d'une grande amitié, les fans du film culte de Tony Scott ne seront aucunement dépaysés.
Nous suivons d'abord la rivalité entre deux pilotes devant se rendre au front dans les derniers mois de la Première Guerre mondiale. Nourrie par leur amour pour la même femme, leur opposition fait néanmoins vite place à une grande complicité.
Les quelque trente premières minutes du film, souvent cabotines et ne lésinant jamais sur les élans mélodramatiques, ne nous laissent aucunement entrevoir l'intensité du spectacle à venir.
Mais dès l'instant où les pilotes Jack Powell (Charles Rogers) et David Armstrong (Richard Allen) quittent le plancher des vaches pour sillonner le ciel du vieux continent, attachez votre tuque avec de la broche, car Wings vous réserve dès lors une série de séquences de batailles aériennes parmi les plus saisissantes jamais filmées. Celles-ci sont d'autant plus entrecoupées dans le dernier acte par des scènes de destruction et de guerre de tranchées tout aussi foudroyantes et chargées émotionnellement.
C'est une chose de dire que la mise en scène de William A. Wellman est impressionnante pour son époque, alors que tout pouvait constituer un défi technique. Mais celle-ci rivalise même de prouesses techniques avec bien des productions du genre ayant vu le jour au cours des plus récentes décennies.
Le perfectionnisme tout comme la débrouillardise et l'intelligence des trucages devraient définitivement être étudiés par bon nombre de cinéastes travaillant à Hollywood aujourd'hui.
Sur le plan dramatique, il y a évidemment quelques éléments qui ont un peu moins bien vieilli, notamment certains changements de tons plutôt abrupts au cours des scènes de combat, et une séquence beaucoup trop longue aux Folies Bergères, à Paris, durant laquelle Jack hallucine des bulles de champagne (pourquoi pas?).
Les maladresses du personnage de Mary Preston, interprété par Clara Bow, qui joint les rangs de l'armée américaine pour tenter d'impressionner l'élue de son coeur, pourraient aussi faire sourciller quelques étudiant.e.s de l'UQÀM.
Malgré tout, cette absence de retenue assumée demeure une force, et confère à l'oeuvre son charme candide.
Et tous ceux qui ne se sont toujours pas remis de la mort de Goose dans Top Gun, il y a dans Wings une scène tout aussi tragique - sinon plus.
Vous êtes avertis.
La première fois que nos deux pilotes héroïques partent pour le combat, vous pouvez mettre sans gêne « Danger Zone » de Kenny Loggins dans le tapis. Vous n'y verrez que du feu.
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::: Niveau de risque d'indignation après visionnement : Quelques irritants pour la gente féminine.
::: Trois films à voir en périphérie : The Big Parade (1925) | All Quiet on the Western Front (1930) | Top Gun (1986)