Nous avons appris récemment que Lionsgate prépare une toute nouvelle adaptation du toujours controversé et ultra violent roman American Psycho de Bret Easton Ellis, avec pour réalisateur nul autre que Luca Guadagnino (Call Me By Your Name, Suspiria, Challengers).
Évidemment, le bouquin a causé sa part de scandales lors de sa sortie, en 1991, avant d'être porté une première fois à l'écran par la réalisatrice canadienne Mary Harron, avec Christian Bale dans le rôle du légèrement instable Patrick Bateman.
Le film s'est révélé une réussite, et a permis à Bale de gagner suffisamment en notoriété pour l'aider, quelques années plus tard, à décrocher le rôle de Bruce Wayne/Batman chez Christopher Nolan.
La question qui tue : une nouvelle adaptation est-elle vraiment nécessaire, considérant la manière on ne peut plus habile dont la première avait su frapper dans le mille?
Surtout, l'idée de refaire American Psycho dans un tel climat de rectitude politique accotée et de constante offense a de quoi rendre les fans de l'oeuvre - littéraire comme cinématographique - un tantinet nerveux.
Ceci étant dit, le long métrage de Mary Harron était en soi assez particulier, puisqu'il s'agissait d'une adaptation à la fois très fidèle et très libre du roman de Bret Easton Ellis.
Se gardant, certes, d'aller aussi loin dans les élans crus et grotesques, ainsi que les excès de sadisme particulièrement graphiques du roman, la cinéaste respectait tout de même à la lettre l'essence du matériel d'origine, mais en se faufilant à travers son récit répétitif et labyrinthique en remettant en contexte certains passages, en résumant plusieurs scènes en une, en plaçant certaines répliques dans la bouche d'un autre personnage, et en condensant d'une manière particulièrement adroite et efficace les innombrables citations de grandes marques du protagoniste.
Mais malgré les indéniables qualités du American Psycho sorti en 2000, quiconque aurait les nerfs assez solides pour se frotter de nouveau à pareil récit aurait l'opportunité de travailler avec suffisamment de contenu inédit pour en tirer quelque chose d'unique.
Patrick Bateman offrant à sa copine une rondelle désodorisante pour urinoir usée et enrobée de chocolat en guise de dessert dans un restaurant chic est une scène parmi tant d'autres que nous n'avons pas encore vues sur grand écran...
Sur papier, Luca Guadagnino apparaît comme un cinéaste de choix pour mener le projet à bon port, ayant déjà fait part de sa propension aux excès de style avec Challengers, de son goût pour le gore, la violence et la provocation avec Bones and All, et de sa capacité à faire vibrer d'autres cordes à partir d'une oeuvre déjà établie avec son remake de Suspiria.
De plus, American Psycho pourrait débarquer dans les cinémas à un moment plus qu'opportun d'un point de vue culturel, alors que le cycle habituel au cours duquel les artistes doivent constamment marcher sur des oeufs est sur le point de faire place à une nouvelle période où ces derniers se permettront enfin d'écraser tous ces jolis cocos de nouveau.
Il ne reste plus qu'à voir qui pourra bien succéder à Christian Bale dans la peau du yuppie de Wall Street le plus sadique et dérangé qui soit. La performance de ce dernier sera certainement difficile à éclipser. Mais, ironiquement, nous avions dit la même chose à une certaine époque du Joker de Jack Nicholson...