Après sa présentation remarquée au Festival du Nouveau Cinéma et des projections à Namur et à Locarno, le deuxième long métrage de Maxime Giroux, Jo pour Jonathan, prend l'affiche ce vendredi à Montréal et à Québec. Le réalisateur et son co-scénariste Alexandre Laferrière parlent d'un film mis en branle rapidement dans la foulée de Demain.
« À la base, c'était un court métrage pour lequel on avait reçu une subvention pendant qu'on tournait Demain. Sauf que quand on a fini le tournage, on n'était pas prêts à faire un autre court métrage, on voulait faire un long. Le sujet était là depuis longtemps, et le court métrage est le coeur du long, c'est juste qu'on a eu la chance d'aller un peu plus profondément dans l'histoire et dans les personnages », nous dit d'abord le réalisateur.
« On avait trois mois avant le début du tournage, alors ça nous a donné le sentiment d'urgence de pondre quelque chose rapidement. C'était bien ça, parce qu'on n'a pas eu le temps de se remettre en question, de suranalyser la chose et de douter », poursuit le co-scénariste.
Il a donc fallu faire des choix déchirants très rapidement. Il faut trouver la bonne histoire, le bon acteur... Maxime Giroux répond : « Quand tu n'as pas de temps, tu doutes moins. À l'international, les gens font leurs films assez rapidement... ce n'est pas tout le monde qui écrit pendant un an, un an et demi. Il faut attendre le financement, c'est normal, mais parfois j'ai l'impression que ça donne des scénarios trop écrits, trop figés. »
Et pour l'acteur? « Ce qui est génial avec ne pas avoir de moyens, c'est que tu fais avec pas de moyens. C'est là qu'on créé le plus. Quand tu as des moyens, tu dois choisir entre cinq acteurs connus. Là, tu ne crées pas, tu es en train de choisir entre Pepsi ou Coke. On est tombés sur Raphaël par son prof de théâtre, qu'on a rencontré. C'est la seule personne que j'ai vue, je l'ai rencontré et je l'ai pris. »
« Il arrivait d'une école de théâtre et, comme beaucoup de comédiens, il avait tendance à trop en mettre pour le cinéma. Ma directive c'était souvent : « Ne fais rien. Laisse le scénario parler. » Il y a une scène avant, une scène après, c'est l'histoire qui se construit qui met de l'émotion, pas besoin d'en mettre trop. »
Alexandre Laferrière poursuit : « Parfois, au tournage, il nous arrive de faire des petites modifications, au niveau du langage entre autres. On a fait des tests d'improvisation, laissé les personnages évoluer... mais finalement, on est revenus à ce qui était écrit. »
On parle souvent des films pour adolescents comme des « portraits d'une génération », est-ce ce que vous vouliez faire? « J'aimerais mettre un bémol là-dessus : ce n'est pas le portrait des jeunes, c'est le portrait d'un jeune, pas d'une génération. Il faut être d'une autre génération pour ne pas comprendre ça. C'est notre vision d'un personnage, pas de tous les jeunes d'une génération. »
Le film sort dans trois salles à travers le Québec, est-ce que d'avoir un budget consacré à la publicité aurait mieux servi le film? « C'est sûr que ça aurait servi le film, mais j'ai un malaise avec ces grosses campagnes de publicité là, au Québec, qui mettent 500 000 $...», répond d'abord Giroux.
- Je pense que le bouche-à-oreille est plus utile...
- Oui, mais le bouche-à-oreille n'existe plus au Québec, tu n'as plus le temps, ça doit marcher dès le premier week-end. Le bouche-à-oreille fonctionne quand tu peux avoir ton film à l'affiche pendant trois mois, mais ce n'est plus comme ça. »
Maxime, faut-il impérativement voir le film dans une salle de cinéma? « L'ironie de la chose, c'est que moi je fais mes films juste pour les salles. Je suis un cinéphile de salle de cinéma, je ne regarde pas de DVD. » Le scénariste poursuit : « Il y a des films qui ne peuvent pas être vus autrement qu'en salle, ce n'est pas la même expérience. Être prisonnier d'une salle, ça fait en sorte que tu découvres des choses que jamais tu ne pensais aimer. »
« Jo pour Jonathan a été sélectionné dans une quinzaine de festivals, ceux qui ont accepté c'est ceux qui ont vu le film en 35mm dans une salle de cinéma. En voyant le DVD, ils ne l'acceptent pas. J'aime ça faire des films de salles de cinéma, et j'en profite parce que bientôt ça ne sera plus possible. »
L'expérience du visionnement en salle est donc essentielle pour vraiment s'imprégner du film. « C'est comme les fameux punchs : moi, je m'en câlisse qu'on dise qu'il tue son frère, c'est pas ça qui est important. Tout est dans la façon cinématographique, dans la vision du cinéaste; tous les sujets ont été faits. Je ne vais pas voir un film pour savoir ce qui se passe à la fin, j'y vais pour voir la proposition du réalisateur sur le sujet. »
Pour Alexandre Laferrière : « Pour le type de cinéma qu'on fait, le punch ce n'est pas important. »