Le tournage de la comédie Bo$$é s'est terminé hier soir à Montréal, alors que Guy A. Lepage, Claude Legault et Valérie Blais tournaient les dernières scènes du film. Le réalisateur Claude Desrosiers est à la barre du projet qui est produit par Lyse Lafontaine et François Tremblay de Lyla Films.
« C'est une parodie du monde de la finance, c'est un faux-documentaire. », nous dit d'abord Claude Desrosiers, qui était à la barre de Dans une galaxie près de chez vous, sorti en 2004. Il a également réalisé les séries Les Rescapés, Vice caché et Les hauts et les bas de Sophie Paquin. Une filmographique diversifiée qui lui sert beaucoup. « Je me sens plus solide que quand j'ai fait Dans une galaxie, parce que c'était un premier film. J'ai fait plusieurs séries depuis, j'ai beaucoup tourné. Quand j'arrive sur un plateau, je me sens très en contrôle des moyens que j'ai. Je me sens très à l'aise, c'est sûr que ça aide beaucoup. »
Bo$$é, cependant, se déroule sur plus de 40 ans et est tourné comme un faux-documentaire. « Il y a beaucoup de détails. On a tourné des scènes de prison. On avait mis des murs de verre, comme une cage, avec des cachots là, des barreaux partout, il y avait des gardiens partout... C'était un peu la prison de verre, comme on imagine Vincent Lacroix ou Earl Jones dans leur cellule. La prison, c'était dans les années 90, on a fait les années 50, 60, 70 et 80. C'est extrêmement complexe, bien plus que de tourner quelque chose de contemporain. C'est plus cher, c'est plus de personnel pour s'en occuper, de recherche. »
Un voyage dans le temps qui affecte aussi les comédiens. « Tu sais, les comédiens sont disponibles, ils sont prêts à foncer dans l'aventure, il faut leur donner une aventure. Il faut leur préparer le terrain, il faut leur donner une piste d'atterrissage. Quand ils arrivent sur le plateau le matin, tout est prêt. Il y a un grand travail de préparation et de discussion qui a été fait avant. »
Les réalités du cinéma québécois font qu'il est difficile de prendre le temps de développer une idée sur le plateau. « Dans le cinéma québécois, les budgets sont trop restreints. On a du temps limité, il faut être efficace. La différence avec une série, où il y a encore beaucoup moins de temps et où je n'ai pas le droit de faire plusieurs prises, c'est que je peux fignoler en faisant des prises. C'est l'fun, parce qu'on peut upgrader le produit, mais je n'ai pas le temps d'expérimenter tellement. » Mais on a l'opportunité de travailler avec les comédiens. « Je peux mieux les préparer, discuter avec eux, mieux les diriger. »
Est-ce que l'humour du film se transmet sur le plateau? « Ce qui est mieux, l'idéal, c'est quand tout ce qui se passe sur le plateau est pris au sérieux, mais quand tu le visionnes après, là c'est drôle. C'est un grand danger, sur le plateau, quand tout le monde rit. Au montage, tu trouves ça... assez poche. Le contraire est plus intéressant. »
Vu le lien évident avec l'actualité, était-il urgent de réaliser le film maintenant? « Ça fait quand même cinq ans qu'on est là-dessus. Urgence de le faire? On était mûrs, on était prêts, fallait le faire là. Les gens vont y voir un lien avec l'actualité, c'est certain. Mais oui, je pense que si on ne l'avait pas fait là, on ne l'aurait jamais fait. »
Claude Legault arbore un look différent pour ce tournage. « C'est un personnage extrêmement doux, et brun foncé comme je suis, je n'ai pas l'air doux tout le temps. Le blond m'adoucit beaucoup. J'ai joué avec mon poids, aussi. Quand j'ai fini l'hiver j'avais un cinq livres de plus que ce que j'ai d'habitude, et je partais en voyage, sept semaines en Europe pour me reposer la tête, et je me suis dit que je n'allais pas me priver. Au contraire, je me suis bourré la face, j'ai mangé, j'ai bu comme un Polonais et je suis revenu vraiment pesant. C'était parfait. Je fais des rôles où je suis obligé d'être assez shapé d'habitude, policiers, etc., là, pantoute! Ça rend le personnage bien sympathique, bien doux. »
Il est d'accord avec Claude Desrosiers lorsqu'il est question de l'humour sur le plateau. « Faut travailler. Faut le faire comme une dramatique. On ne peut pas rire des jokes, on ne peut pas les pousser sinon on est à côté de la track. Sinon on n'est pas drôles, parce que ce n'est pas des gros liners de one man show, c'est vraiment des lignes qui sont drôles si tu fais juste les jouer. Claude nous dirige de façon très serrée là-dessus. » Est-ce compatible avec Guy A.? « Tout à fait. Je suis absolument compatible avec lui. On se rejoint beaucoup, c'est un gars qui peut faire des jokes complètement mongoles et tout de suite t'embarquer dans des conversations ultra-sérieuses, et je suis pareil. Mais on est plus mongols souvent. »
Le voyage dans le temps du film permet un retour dans le passé. « Chaque époque a ses bons moments, a ses beautés. Chaque époque a ses laideurs aussi. Parfois, quand on recule, on voit ça avec une nostalgie, mais si on y retournait, on dirait « oh boy! ». On garde juste le meilleur en tête. Le linge que je porte actuellement est absolument inconfortable. » Et pas très beau non plus. « Non. Je me rends compte qu'on portait des tissus pour s'arracher la peau avec un râteau. Et c'est chaud. »
« On dirait qu'il ne s'est rien passé au Québec en 40 ans, mais quand tu fouilles un peu... Vu qu'on est dans le monde de la finance, des finances publiques, des scandales économiques, il y en a eu pas mal, au Québec et partout dans le monde. Le cynisme actuel des gens n'a pas pris racine nulle part, il est ancré dans quelque chose de réel. Tu pars du Stade Olympique aux commissions d'enquête, à ceux qui ont fourré qui s'en sont sortis... Ce n'est pas étonnant que la classe moyenne ait diminué. »
« Au Québec, et on le voit dans le film, il y a un système d'immunité envers les crosseurs qui est institutionnalisé. Le film le dévoile un peu. Ce n'est pas nouveau, les gens le savent, mais ils vont s'amuser au moins en le regardant. »
Lorsqu'on met tous ces événements côte-à-côte, c'est assez déprimant. « Mais le film le traite avec humour. C'est absurde et c'est assez cinglant. Les gars écrivent de façon humoristique mais sur des bases hyper-réalistes. »
Élise Guilbeault, James Hyndman, Magalie Lépine-Blondeau, Cynthia Wu-Maheux, Benoît McGinnis, Gabriel Arcand et Yves Pelletier font aussi partie de la distribution du film, qui a été scénarisé par Yves Lapierre, Luc Déry et André Ducharme. Ces derniers ont également signé les textes de Camping sauvage.
Bo$$é est attendu dans les cinémas en mars 2012.