La réalisatrice Léa Pool réalise avec La dernière fugue un long métrage résolument engagé socialement. « J'ai peut-être envie d'aller dans des thèmes plus sociaux, plus politiques que dans mes premiers films, qui étaient des films plus intimes, plus introspectifs, à tendance biographique. Je dirais que j'ai envie de donner un sens aux films que je fais, d'emmener des questionnements ou des débats de société. »
Croyez-vous que la distinction entre le cinéma populaire et le cinéma d'auteur fasse partie de ce débat? « Je pense qu'il y a beaucoup de cinéma qui se situe entre les deux, c'est là que j'espère être. J'ai le goût que les gens soient là tout en essayant de me respecter, et de respecter les thèmes qui m'importent. Disons, avoir un public qui a envie de voir ces films-là... On ne peut pas tout le temps tout le temps voir des comédies, ni tout le temps travailler avec des acteurs qu'on voit déjà à la télé. »
Ce film est-il près de la version finale du scénario? « On pense qu'on a un film en tête, mais un film, ça bouge sans arrêt. Le personnage de Jacques Godin devait être joué par un autre acteur, un acteur français à cause de la co-production avec le Luxembourg. Ça aurait été un autre film, Andrée Lachapelle n'aurait pas pu jouer avec Michael Lonsdale la même femme qu'elle joue avec Jacques Godin. Un seul acteur faisait glisser tout le film vers quelque chose de différent. »
Quelle qualité recherchez-vous chez vos comédiens? « C'est une qualité que tous les réalisateurs cherchent : ce sont des gens qui n'ont pas peur de se jeter à l'eau, d'essayer des affaires. On a fait beaucoup d'improvisation, on a fait des ateliers avant le tournage, qui avait lieu au Luxembourg. Être là-bas nous a servi, parce qu'on était en milieu clos, fermé, qu'on était en famille et qu'on a appris à se connaître. »
Yves Jacques est entièrement d'accord avec sa réalisatrice : « Ça nous a servi beaucoup de tourner au Luxembourg, parce que la famille a existé. C'est un beau souvenir, j'étais heureux qu'on m'offre un rôle aussi grave. »
« Léa a commencé un peu sur les chapeaux de roues, car elle a eu la décision des institutions très tard, et quand elle a eu la réponse, elle n'avait pas terminé d'écrire son scénario, c'était vraiment une ébauche. On a créé cette famille avec des improvisations... »
Que cherchait-elle chez vous? « Elle cherche une vérité, une justesse... » Les comédiens travaillent beaucoup avec les mots, qui viennent ici d'une source littéraire. « C'était assez littéraire, donc il a fallu mâcher ça. Il y a des scènes qui ont été créées à partir de descriptions, dans le roman. C'est le travail habituel d'un acteur. Il y a un ton dans le film qui se veut un peu plus soutenu, au lieu que ce soit le joual habituel. On est tellement habitué par ce qu'on entend à la télé... Ce n'est pas parce qu'on parle québécois qu'on ne peut pas bien s'exprimer dans la vie. Pourquoi est-ce qu'un film n'aurait pas un autre langage que la langue parlée de tous les jours? Il fallait faire un travail pour que ce ne soit pas littéraire, mais on ne voulait pas enlever toute la saveur de Gil Courtemanche. »
Le film prend l'affiche ce vendredi.