Le « maître de l'horreur », Wes Craven, nous présente cette semaine son plus récent film, My Soul to Take, qui marque son retour à la réalisation après cinq ans d'absence. Craven est bien connu des amateurs d'épouvante puisqu'il a, à son actif, plusieurs films cultes qui ont contribué à donner une certaine crédibilité au genre. Il est probablement le premier, au milieu des années 80, à avoir proposé à un public jusque là habitué à des brutes sanguinaires sans profondeur, une nouvelle forme d'horreur mettant en scène un vilain cruel doté d'une intelligence malveillante et rusée (A Nightmare on Elm Street, 1984).
C'est donc dans une industrie où succès ne rime pas nécessairement avec créativité que Craven a vu récemment sa plus populaire mythologie reportée à l'écran dans un remake de son vieux classique où Freddy Krueger reprend du service : nouveau look, vieille histoire. Malgré cela, une suite est prévue en 2012. Pourquoi donc les studios s'obstinent-ils à remâcher les mêmes histoires? De la même manière que le meurtrier, monstre ou démon ne meurt véritablement jamais dans un récit d'horreur, les studios répugnent à mettre un terme à des franchises aussi lucratives. Après tout, rafraîchir les coupes de cheveux et changer les costumes ne coûte pas une fortune et cela permet de s'en mettre plein les poches à intervalle de trente ans, en réactualisant, pour un nouveau public, les mêmes bonnes vieilles règles d'or.
Règle # 1 : Faire dans la simplicité pour ne pas perdre son auditoire
Pour la plupart, les films d'épouvante sont basés sur quelques canevas bien précis qu'il suffit de remanier selon le goût du jour. L'objectif : permettre au public majoritairement composé d'adolescents de vivre quelques frissons sans avoir à se casser la tête. Le 3D vient ajouter une donnée supplémentaire.
Il existe 3 types de films d'horreur :
1 - le slasher movie (Halloween, Friday the 13th, A Nightmare on Elm Street, The Texas Chainsaw Massacre, I Know What You Did Last Summer, Scream, Saw) où un meurtrier sadique assassine ses victimes avec un renfort d'hémoglobine.
2- le film d'horreur surnaturel (Final Destination, The Cube, The Exorcist, The Orphanage, The Others, The Ring, Poltergheist, The Amityville Horror, The Shining) où une entité maléfique tente de contrôler, de perturber, voire de mettre un terme à la vie des protagonistes, soit par le biais d'un objet symbolique, la possession d'un corps ou la hantise pure et simple d'un endroit.
3- le film de « monstres » (Anaconda, Jaws, Alien) ou les héros doivent échapper à une ou plusieurs créatures vicieuses qui veulent s'en nourrir. La plupart des films d'horreur post-apocalyptiques peuvent entrer dans cette catégorie (28 Days Later, Resident Evil, Dawn of the Dead)
Tout film qui s'écarte de ces catégories prend le risque de décevoir les attentes de son public (ou de surprendre par son originalité et d'aller chercher un auditoire différent, par exemple The Mist, dont la finale avait choqué).
Règle # 2 : Avoir un monstre ou un méchant monolithique (simple), dont l'histoire est nimbée de mystère (mythologie)
Qu'ont en commun le requin de Jaws, Michael Myers, la petite fille mouillée dans The Ring et Jigsaw? Primo, ils sont très méchants, secundo, ils sont plus intelligents que les protagonistes dans leurs films et tercio, leur passé est entouré de mystère : la seule chose que l'on sait avec certitude, c'est que le mal y tire sa source.
Après tout, Jaws est non seulement un très gros requin blanc, mais c'est un amateur de chair humaine. Pourquoi? On ne le sait pas, mais il aime manger des surfeuses en bikini. Quant à Michael Myers, le fait qu'il ait passé son enfance en institution psychiatrique peut expliquer en partie qu'il se promène en ville avec un masque sur le visage en poursuivant les membres de sa famille avec un couteau. Pour ce qui est de la petite fille mouillée de The Ring, elle est morte dans un puits où sa maman, qui la trouvait maléfique, l'avait fait tomber. Elle en a conservé une forme de ressentiment dans l'au-delà qui se manifeste par l'assassinat systématique de tous ceux qui visionnent sa cassette sans en faire de copie. Finalement, Jigsaw, le tueur en série/coach de vie de la série Saw est en phase terminale du cancer, ce qui le pousse à inciter les gens à chérir leur existence en les forçant à tuer d'autres êtres humains pour survivre.
Règle # 3 : Avoir une fin ambigüe
Le combat entre la jeune vierge et le monstre doit nécessairement aboutir à la victoire du Bien... jusqu'à la prochaine fois! Qu'il s'agisse d'un film de slashers comme les Halloween ou à saveur post-apocalyptique comme 28 Days Later, les héros doivent nécessairement s'en tirer vivants après avoir perdu leurs amis ou vu mourir la majorité des personnages secondaires. Par contre, les films où le meurtrier refait une apparition à quelques secondes de la fin sont légion, et lorsque ce n'est pas le monstre qui réapparaît pour une ultime frousse, c'est la musique thème qui fait le travail pour paver la voie à une suite potentielle, comme ce fut le cas dans The Exorcist ou Amityville.
En bout de ligne, les films d'horreur trouveront toujours un public passionné et prêt à voir et revoir ses classiques, et c'est pourquoi Hollywood multiplie les remakes (My Bloody Valentine, Prom Night, The Omen, etc.). Or, comme dans tous les genres, certains films sont plus réussis que d'autres et les films d'horreur les plus intéressants des dernières années proviennent de l'étranger. On peut penser à Let Me In, qui a pris l'affiche en salle la semaine dernière et qui est une adaptation du film suédois Let the Right One In, que l'on a pu voir à Fantasia l'an dernier, ou alors à The Ring, adapté de la série Ringu japonaise. Hollywood a perdu du terrain et ne fait plus grand-chose d'original. Dans un marché où la compétition est aussi forte et où l'offre en films d'horreur augmente sans cesse, il demeure peu probable que Craven, le soi-disant « maître de l'horreur », réussisse à séduire un nouveau public avec My Soul to Take et puisse ainsi redonner une part de prestige à l'industrie américaine de la terreur.
Il existe trois règles d'or qui assurent le succès d'une franchise d'horreur.
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